EKALI II
Dieudonné Elono Akomo. Le chef traditionnel de 3ème degré explique comment une communauté « allogène » a fait son nid dans le département de la Mefou et Afamba
Ils sont nombreux ceux qui trouvent curieuse la présence, à Ekali II, d’une importante communauté Ntoumou, dont le fief naturel se trouve pourtant à l’extrême-Sud du pays. Une présence quelque peu insolite, dans l’histoire même des grandes migrations africaines.
Tout part en effet de l’exode des Fang-Béti de l’Afrique du nord vers le Cameroun. Quand il a fallu traverser la Sanaga à dos de serpent, c’est Ntoumou, le troisième fils d’Afiri Kara, l’ancêtre Fang-Beti qui avec se descendance a traversé en troisième lieu. Il avait été précédé par les pygmées et les Ngoumba.
Une fois, l’obstacle naturel de la Sanaga franchi, explique Dieudonnée Elono Akomo, chef traditionnel de 3ème degré d’Ekali II, grand village situé à 32 Km de Yaoundé et à 10 Km de Mbalmayo, Ntoumou et sa descendance commencent un grand trek. Dans un premier temps, ils s’installent à Eloundene, un village de l’actuel arrondissement d’Okola, non loin de Mbankomo.
Mais les Ntoumou ne semblent pas à l’aide en pays Eton. Ils entament un nouvel exode et s’installent à Abegle, contrée de l’ex district de Nkolafamba, non du lieu dit « Hélice Avion », puis continuent vers Nlo-Kie par Dzeng pour enfin s’établir à Nkilzok, à quelques encablures de Mfou. Entre-temps, d’autres membres de la grande famille Ntoumou, en quête de sel, font route vers l’Océan Atlantique et la région de Kribi. Peu avant l’arrivée des Allemands au Cameroun, une notabilité Ntoumou de Nkilzok se détache et vient prendre racine à Ekali II. C’est le début du fondement du grand village. L’arrivée des Allemands entraîne l’avènement des chefferies traditionnelles. Dans le souci d’organiser les populations autour de grands villages, les Ntoumou de Nkilzok sont priés par l’administration coloniale d’aller s’établir à Ekali II. La chefferie traditionnelle devient une réalité ici à l’aube de la colonisation. Enyougou Nke devient alors le premier chef de la communauté Ntoumou, qui se retrouve imbriquée entre les Bene (Mvog Manga, Mvog Onomo, Otoloa, Mvog-Amougou). Cette proximité leur fera peu à peu perdre leur langue originelle et adopter l’éwondo, plus dans la région ; mais ils auront réussi malgré les brassages, à garder un fort sentiment d’appartenance aux Ntoumou « Esakoran ». malgré la distance qui les s épare, les Ntoumou d’Ekali II entretiennent des rapports plus que cordiaux et intimes avec leurs frères Essakoran qui sont actuellement établis dans le département de la Vallée du Ntem (région du Sud), notamment à Meyo-Centre, Ambam, Assandjick, Olamze et même en Guinée Equatoriale.
« Nous nous fréquentons lors des évènements heureux ou malheureux. Nous nous connaissons bien. Il suffit de préciser que vous êtes originaires d’Ekali II, ou vice versa, et vous êtes chaleureusement accueilli », ajoute Dieudonné Elono Akomo, qui n’est pas peu fier d’être, depuis bientôt trente ans, le chef
– le septième de la lignée – d’un village qui bouge dans tous les sens du terme.
Grâce à une élite inférieure et extérieure dynamique et cornaquée par Luc Evariste Etogo Mbezele, Ekali II dispose de nombreuses infrastructures sociales. On y retrouve ainsi un centre de santé intégré, une école publique, une école maternelle, un collège d’enseignement technique, un poste agricole, un noviciat… C’est déjà beaucoup, mais bien peu pour un chef qui rêve encire pour sin village et ses quelque 3000 âmes, qui y vivent de l’agriculture et de l’artisanat, très développées ici, d’un meilleur accès à l’eau potable, mais aussi d’un marché de vivres et de bien d’autres commodités.