PARIS (Reuters) – Le ministère des Affaires sociales et de la Santé est favorable au maintien du monopole des pharmacies pour la vente de tous les médicaments, dont l’Inspection des finances (IGF) recommande pour sa part la remise en cause partielle.

Dans un rapport commandé par l’ex-ministre de l’Economie Pierre Moscovici et cité par Les Echos, l’IGF souhaite autoriser la vente de produits comme le Doliprane, le Spasfon, l’Aspégic, le Nurofen, l’Humex ou le Fervex, ailleurs qu’en pharmacie.

Ces médicaments de grande consommation, dont certains, comme les trois premiers, sont remboursables s’ils sont délivrés sur ordonnance, pourraient ainsi être également vendus en grande surface. Objectif, selon le journal: faire baisser leur prix.

Ils représentent environ 9% du chiffre d’affaires des pharmacies, enclines à augmenter leurs tarifs pour compenser la baisse de celui des médicaments remboursés, fait valoir l’IGF.

« Ce rapport est un document administratif qui n’engage pas le gouvernement », dit-on cependant au ministère des Affaires sociales et de la Santé, interrogé par Reuters.

La ministre, Marisol Touraine, est favorable à une « modernisation des pratiques dans l’intérêt de la sécurité sociale et des patients », souligne-t-on de même source.

Ses priorités sont notamment de limiter la consommation de médicaments en France -l’une des plus importantes en Europe- et d’encadrer les prix, ajoute le ministère.

Mais, précise-t-il, « ces évolutions se feront dans le respect du principe du monopole officinal sur les médicaments et du statut spécifique de ces produits, qui ne sont pas des biens de consommation comme les autres. »

La mise en concurrence proposée par l’IGF est plus en ligne avec la volonté du ministre de l’Economie, Arnaud Montebourg, de « restituer » aux Français six milliards d’euros de pouvoir d’achat en cassant le monopole de professions réglementées.

RENCONTRE MONTEBOURG-PHARMACIENS

Dans la même logique, une loi sur la consommation de mars 2014 autorise déjà la vente en parapharmacie et en libre-service dans les grandes surfaces de tests de grossesse et des produits d’entretien des lentilles de vue.

Arnaud Montebourg recevra mardi des représentants des pharmaciens, dont les marges sont pointées du doigt par le rapport de l’IGF, a déclaré sur France Inter le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).

« Bien entendu, on s’expliquera », a dit Philippe Gaertner. « On va regarder ensemble ce qui a été écrit, le pourquoi. »

« Sur le prix des médicaments, qui est libre, nous ferons des propositions au ministre », a-t-il ajouté. « On peut très bien imaginer d’avancer dans le même genre de propositions que ce qui a été retenu (…) pour le prix du livre, avec un prix réglementé, y compris sur les médicaments en vente libre. »

Il a cependant invité le gouvernement à ne pas se focaliser sur la seule dimension économique et à prendre en considération les problèmes de santé publique et de contrefaçon: « Le dossier est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. »

Selon Les Echos, l’IGF recommande aussi la fin du numerus clausus pour les étudiants en pharmacie, l’ouverture du capital des officines à des investisseurs extérieurs et une liberté d’installation totale pour les pharmaciens.

Le ministre de l’Economie, conscient du caractère sensible des propositions de l’IGF, a mis l’embargo sur la publication de son rapport jusqu’à ce qu’il puisse être accompagné des arguments contradictoires des professions visées.

Selon son entourage, ce document et ces annexes seront mis en ligne par le gouvernement « fin août-début septembre ».

« Nous tenons à ce que le débat soit serein », a-t-on expliqué de même source à Reuters.

L’Union nationale patronale des prothésistes dentaires (Unppd), autre profession visée par Arnaud Montebourg, a demandé à ses mandants d’envoyer « en masse » des prothèses au ministre pour qu’il « entende enfin (leurs) revendications ».

L’Unppd taxe dans un communiqué le ministre de l’Economie de « méconnaissance » de ce secteur, qui compte 3.800 laboratoires et près de 19.000 actifs, et du processus de fabrication et de mise sur le marché des prothèses dentaires.

(Marion Douet et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)