Les contrats administratifs par détermination de la loi.
En vertu de la loi du 28 Pluviose an VIII, les contrats relatifs à l’exécution d’un travail public ont un caractère administratif, même s’ils se réfèrent aux règles de droit privé.

Parmi les nombreux contrats passés par l’administration, certains sont des contrats de droit privé tandis que d’autres, de par leur objet spécifique ou leurs caractéristiques particulières, seront qualifiés de contrats administratifs. Ces contrats sont eux même d’une grande diversité, qu’il s’agisse de contrats passés en application du Code des Marchés publics, de contrats comportant occupation (durable, définitive, temporaire) du domaine public ou encore de contrats de délégation de services publics .

I – DEFINITION DES CONTRATS ADMINISTRATIFS

2 critères nécessaires pour qu’un contrat soit administratif :

1- critère organique : Un contrat ne peut être sauf exception qualifié d’administratif par le juge que si l’une des parties au moins au contrat est une personne publique.
Il convient d’abord d’examiner si cette condition est remplie, avant même de s’interroger sur le point de savoir si le contrat comporte une clause exorbitante de droit commun ou a pour objet l’exécution même d’un service public.

Lorsqu’un contrat est passé entre deux personnes de droit privé, il reste un contrat de droit privé, même s’il contient une clause exorbitante de droit commun. C’est le cas de l’arrêt du CE du 20.12.1961 Sté d’Autoroute Esterel Côte d’Azur.

Contrat également de droit privé….

Un contrat passé entre deux personnes privées n’est pas un contrat administratif même si l’une d’entre elle est chargée d’une mission de service public. (Tribunal des Conflits du 03.04.1969, Sté Interlait, CE 13.12.1963 Syndicat des Praticiens de l’art dentaire)

La 1ère exception est celle des personnes privées qui peuvent être investies d’une mission de SP. Les contrats peuvent parfois être des contrats administratifs, c’est l’hypothèse dans laquelle la personne privée a reçu de la personne publique un mandat. En ces lieux et place, la personne est transparente, le juge rétablit la réalité des choses : le contrat peut être un contrat de droit public à condition que le critère alternatif soit rempli. Le mandat doit être explicite ou tacite.

La 2ème exception : une personne privée peut agir « pour le compte » d’une personne publique
Le Tribunal des Conflits a admis que les contrats conclu entre une SEM concessionnaire d’une autoroute cad d’un ouvrage public et des entrepreneurs, tous deux personnes de droit privé, étaient des contrats de droit public (TC, 08.07.1963 Entreprise Peyrot). Le Tribunal a estimé que ces marchés, étaient, vu leur objet, nécessairement conclu -pour le cpte de l’Etat- En fait, par l’emploi de la formule « Pour le compte de », le Tribunal a voulu pour des raisons sans doute plus pratiques que juridiques, soumettre tous les marchés liés aux travaux routiers, au régime juridique des travaux publics.

2- critére alternatif : l’objet du contrat ou la clause exorbitante
Pour être qualifié d’administratif, ce contrat doit apparaître comme un acte de gestion publique soit en raison de ses clauses (stipulations, contenu), soit en raison de son objet (exécution d’une mission de SP).

a- la présence d’une clause exorbitante de droit commun

Arrêt CE du 31.12.1912, Sté des Granits Porphyroïdes des Vosges. « fourniture de pavage Ville de Lille ». C’est cet arrêt qui a établi ce critère
« Considérant que le marché passé entre la Ville et la Sté était exclusif de tous travaux à exécuter par la Sté et avait pour objet unique des fournitures à livrer selon les règles et conditions des contrats intervenus entre particuliers ; qu’ainsi ladite demande soulève une contestation dont il n’appartient pas à la juridiction administrative de connaître. » Les conclusions du commissaire du Gouvernement Léon Blum : ne retenir que le critère des clauses exorbitantes de droit commun, ne pas s’intéresser à l’objet du contrat. C’est le régime exorbitant de droit commun auquel est soumis le contrat qui donne à celui-ci un caractère administratif.

b- le contrat a pour objet de confier l’exécution même même du SP
1° Ce cas est illustré par l’Arrêt CE du 20.04.1956 Epoux Bertin – « Les époux Bertin s’étaient engagés, pour une somme forfaitaire de 30 francs par homme et par jour, à assurer la nourriture des ressortissants soviétiques hébergés au centre de rapatriement de Meaux en attendant leur retour en Russie ; que ledit contrat a eu pour objet de confier, à cet égard aux intéressés l’exécution même du SP alors chargé d’assurer le rapatriement des réfugiés de nationalité étrangère se trouvant sur le territoire français ; que cette circonstance suffit, à elle seule, à imprimer au contrat dont s’agit le caractère d’un contrat administratif ». On peut remarquer que c’est un contrôle purement verbal. L’Etat décide de modifier le contrat sans indemnité. Le juge regarde la nature du contrat, c’est bien un contrat administratif parce qu’il est une modalité d’exécution du SP qui a été confié aux épx Bertin ; modalilté exclusive. Il juge en raison de l’objet.

Critère alternatif : clause exorbitante ou objet
2° Arrêt CE du 20.04.1956 , Ministre de l’Agriculture contre Consorts Grimouard
l’ONF assure le reboisement, mise en état des forêts. L’ONF est investie de cette mission de SP et la remplit par différents moyens, par des contrats passés par elle avec les propriétaires de ces terrains. L’ONF a procédé à des défrichements sans l’accord des propriétaires, et facturait aux propriétaires les coûts de ces interventions.
Lesdites opérations ont le caractère de TP et que, quelle que puisse être la nature des stipulations incluses dans les contrats dont il s’agit, ceux-ci tiennent de leur objet même le caractère de contrats administratifs. « Un contrat portant participation à l’exécution du SP est administratif ».
La nature du contrat est bien administratif en raison des clauses exorbitantes de droit commun, qui comporte que l’ONF peut décider de son défrichement, reboisement et peut procéder à des recouvrements par voie forcée.

DEFINITION : CLAUSE EXORBITANTE DE DROIT COMMUN
La clause exorbitante de droit commun permet, de la même façon que la participation à l’exécution d’une mission de SP, de déterminer le caractère administratif d’un contrat passé par une personne publique. Même s’il n’existe pas de définition précise de la clause exorbitante de droit commun, on peut dire qu’il s’agit de clauses qui soit mettent en œuvre ou manifestent la présence de prérogatives de puissance publique, soit placent la personne publique contractante en situation prééminente par rapport à l’autre partie au contrat.

II – LES RELATIONS CONTRACTUELLES (entre les parties)

L’Administration va bénéficier de certaines prérogatives qui trouvent leur fondement dans les nécessités des services publics mais le cocontractant bénéficie en contrepartie de certaines garanties essentiellement financières (le respect de l’équilibre financier du contrat)

1° Les prérogatives de l’administration – (droits Administration)

Ces prérogatives, qu’il s’agisse du pouvoir de direction et de contrôle, du pouvoir de modification unilatérale ou du pouvoir de résiliation, appartiennent à l’Administration même lorsqu’elles ne sont pas expressément prévues par le contrat et celle-ci ne saurait y renoncer en vertu des règles applicables aux contrats administratifs.
Arrêt CE du 02.03.1983 – Union des Transports Publics Urbains Régionaux
Le CE a estimé que ces pouvoirs (résiliation, sanction…) que l’Administration tient des contrats existe même en l’absence de clauses qui les lui confèrent pour qu’ils existent » en vertu règles applicables aux contrats administratifs ».

a – Le pouvoir de direction et de contrôle
L’AD peut vérifier que le co-contractant exécute bien le contrat, lui donner des instructions sur les modalités d’exécution du contrat, même en dehors des prescriptions du marché. Elle peut imposer l’ordre des opérations à accomplir ou l’emploi de certains procédés de réalisation des prestations. Ce pouvoir se manifeste par des ordres de service que le co-contractant est tenu d’exécuter.

b – le pouvoir de modification unilatérale a été dégagée très tôt.

C’est la théorie de la mutabilité du contrat administratif. Elle est purement prétorienne. Elle a été établie il y a un siècle par deux décisions importantes : CE, 10 janvier 1902 Cie nouvelle du gaz de Delville-lès-Rouen, CE 21 mars 1910 Cie française des tramways.
A la fin du XIXème siècle, la Commune de Delville décide d’instaurer un éclairage public dans ses rues et charge une entreprise privée des travaux et de l’exploitation du système. Une concession de 99 ans est passé. Par la suite la Commune veut passer à l’éclairage électrique et se tourne vers son concessionnaire. La Cie refuse et intente une action devant le CE. Dans son arrêt celui-ci admet que l’administration a un pouvoir de modification unilatérale. Toutefois, ce pouvoir n’existe qu’à certaines conditions :
– il faut que les nécessités du SP l’exigent
– il faut que les modifications n’excèdent pas certaines limites
– il faut que l’équilibre financier du contrat soit respecté.
Cette possibilité de modification unilatérale a été réaffirmée dans l’arrêt : CE 2 février 1983 Union des Transports Publics
CE arrêt du 21.03.1910 Compagnie Générale Française des Tramways. Le Préfet avait imposé l’été à la Cie concessionnaire d’augmenter le nombre des rames en circulation et de changer les horaires. La Cie a contesté ce pouvoir de l’Ad. Le CE quant à lui a reconnu à l’AD le pouvoir de modifier unilatéralement les conditions d’exploitation du SP dans l’intérêt de l’usager à condition d’indemniser le concessionnaire le surcroît de charge que cela lui incombe.

c – le pouvoir de sanction

En cas de faute dans l’éxécution du contrat, l’administration dispose d’un pouvoir de sanction. Ce pouvoir existe de plein droit et de façon unilatérale :
Arrêt CE du 31.05.1907 DEPLANQUE
Le CE a officiellement reconnu à l’Administration de pouvoir modifier unilatéralement les stipulations d’un contrat considérant que c’est une clause inhérente au contrat.
L’AD peut infliger des sanctions si méconnaissance ou pour inobservation des instructions reçues, ces sanctions interviennent après mise en demeure, sauf si urgentes, les sanctions sont motivées de deux sortes :

1 – les sanctions pécuniaires prennent la forme de pénalités ou de retenues destinées en particulier à sanctionner des retards d’exécution.
2 – les sanctions coercitives permettent à l’AD de se substituer elle-même ou de substituer un tiers au cocontractant, l’exécution du contrat étant poursuivies aux frais et risques de ce dernier.

d – le pouvoir de résiliation unilatérale (sanction la plus grave)
Pour mettre en œuvre son pouvoir de résiliation unilatérale l’administration doit selon le CE rassembler deux conditions suivantes :
– seul l’intérêt du service justifie la résiliation
– le cocontractant a seulement droit à une indemnisation
De plus seraient nulles les clauses d’un contrat qui auraient pour objet d’exclure cette résiliation (CE, 6 mai 1985, Association Eurolat)

L’AD peut prononcer unilatéralement la résiliation d’un contrat administratif, soit à titre de sanction (sauf en matière de concession où celle-ci ne peut être prononcée que par le juge, soit, même en l’absence de faute du cocontractant, pour des motifs d’intérêt général).
Selon je JA, l’Ad peut mettre fin avant terme à un contrat « en vertu des règles applicables aux contrats administratifs, aussi bien pour un contrat de fournitures que pour un contrat de concession. Toutefois, ce pouvoir ne peut être exercé que sous réserve des droits à l’indemnité des intéressés, du moins lorsque le cocontractant n’a pas commis de faute.

2° Les droits du cocontractant à l’équilibre financier du contrat (obligations de l’Administration)

Le particulier a droit à l’obtention de la rémunération convenue et au rétablissement de l’équilibre financier du contrat dans l’hypothèse où ce dernier serait rompu.
. Il a droit au paiement de la rémunération fixée initialement (prix versé par l’administration, redevance prélevée sur les usages du service pour une concession) qui ne peut être modifié unilatéralement par l’administration.
. Il a droit au rétablissement de l’équilibre financier en cas de prestations nouvelles imposées par l’administration

1 – La théorie du fait du prince
Lorsque la personne publique contractante prend une mesure telle l’augmentation du taux de certaines impositions ou l’institution de prescriptions nouvelles en matière de sécurité du travail, qui ont pour effet d’alourdir les conditions financières d’exécution du contrat pour le cocontractant, celui-ci a droit à une indemnisation permettant de rétablir l’équilibre financier initial du contrat (CE, 02.02.1983, Union des Transports Publics Urbains et Régionaux).

2 – la théorie de l’imprévision

Il y a application de la théorie de l’imprévision en cas de survenance de faits nouveaux étrangers à la volonté des parties entraînant un bouleversement des conditions économiques d’exécution du contrat. Ainsi, l’augmentation considérable du prix du charbon nécessaire à la fabrication du gaz par le concessionnaire oblige l’administration à aider pécuniairement le concessionnaire en situation gravement déficitaire.
CE arrêt du 30.03.1916 Cie Générale d’éclairage de Bordeaux.
Contrat Ville de Bordeaux antérieur à 1914. Les conditions d’exploitations devenaient de plus en plus périlleuses. La question se posait alors de la continuité du SP. Le CE a dégagé la théorie de l’imprévision qui impose à l’Ad contractante l’obligation d’aider financièrement le cocontractant à exécuter le contrat lorsqu’un événement imprévisible étranger à la volonté des parties a provoqué le bouleversement économique du contrat.
Il faut que le contrat soit bouleversé. Cette théorie est née de la volonté de satisfaire aux exigences de continuité du SP.

Les conditions de l’indemnisation :
Le JA admet une possibilité d’indemnisation ds certaines conditions :
. Il faut que l’aléa soit indépendant de la volonté des parties et imprévisible : guerre, crise économique grave, dévaluation monétaire, et difficilement résistible.
. Le bouleversement doit présenter un caractère temporaire
. Le cocontractant doit poursuivre l’exécution du contrat malgré les difficultés rencontrées. L’indemnité d’imprévision fixée sous le contrôle du juge, va couvrir une partie du déficit qu’il a subi (90 à 95 %). L’Etat d’imprévision, toujours temporaire, prendra fin soit par le rétablissement de l’équilibre du contrat, soit par sa résiliation.

Distinction entre force majeure et imprévision
CE arrêt du 09.12.1932 Cie des Tramways de Cherbourg
Dans le cas où des conditions économiques nouvelles ont créé une situation définitive qui ne permet plus au concessionnaire d’équilibrer ses dépenses avec les ressources dont il dispose, le concédant ne saurait être tenu d’assurer aux frais du contribuable, et contrairement aux prévisions essentielles du contrat, le fonctionnement d’un service qui a cessé d’être viable ; que, dans cette hypothèse, la situation nouvelle ainsi créée constitue un cas de force majeure et autorise à ce titre aussi bien le concessionnaire que le concédant, à défaut d’un accord amiable sur une orientation nouvelle à l’exploitation, à demander au juge la résiliation de la concession, avec indemnité s’il y a lieu, et en tenant compte tant des stipulations du contrat que de toutes les circonstances de l’affaire.

Autres droits du cocontractant …

1 – le cocontractant doit s’acquitter de ses obligations. Il n’a pas de pouvoir d’actions unilatérale. Il peut saisir le juge de pleine juridiction. Le cocontractant ne peut pas suspendre l’exécution du contrat en tout ou partie même pour riposter à un comportement fautif de l’Ad.

2 – le cocontractant ne peut pas invoquer à l’encontre de l’Ad l’exception de non application par l’autre partie « exceptio non adiupleti contractus »

3- Il a droit au paiement du prix convenu, en règlement des prestations effectuées (après service fait). Toutefois, le contrat s’il est décidé à prix ferme, il y a cependant différentes clauses de révision qui permettent d’en modifier les prix.

– les clauses d’ajustement (clauses de révision, clauses variables)

a – les clauses de révision
Elles fixent les conditions dans lesquelles les parties s’entendront, négocieront sur des nouveaux prix.

b- les clauses variables
Elles déterminent la formule de calcul à appliquer automatiquement (années 70-80 forte dépréciation monétaire….)

Les acomptes sont possibles ou les avances forfaitaires ou facultatives.

Une avance : anticipation sur ce qui sera dû parce que déjà fait.
Un acompte : service fait lorsqu’un marché est fractionné en plusieurs opérations.

Théorie des sujétions imprévues – Ce sont les marchés de TP
Le cocontractant (l’entrepreneur se heurte à des difficultés matérielles d’exécution non prévues et qui sont extérieures à sa volonté et qui augmentent ses charges alors l’Ad contractante doit l’indemniser de ce supplément de dépenses. Il faut toutefois que les sujétions imprévues aient bouleversées le contrat.

Tout contrat comporte des documents :
Certaines clauses sont prédéterminées, déjà rédigées pour ce qui concerne les MP, les contrats domaniaux, un cahier des clauses qui est imposé à la volonté des parties dans code qui les régit pour encadrer les politiques contractuelles des collectivités publques.

Pour les MP :
– Les documents généraux : le code des MP -08.01.2004-
– Les documents particuliers

Le C.A.G : ces cahiers sont adaptés à l’objet du marché et ils sont notamment relatifs à l’établissement des prix aux modalités de financement, aux conditions de réalisation des prestations.

Le C.T.G : il reprend les aspects techniques du marché, à côté de ces documents, les documents particuliers propres à chaque marché : le CAP, le C C T P. Avant la conclusion du contrat, ces cahiers sont des règles obligatoires, une fois qu’ils sont incorporés dans le contrat, ils acquièrent une valeur juridique contractuelle. Toute modification dans ces cahiers est sans incidence du contenu des contrats sauf avenant, ou loi contraire.