Décret N°2011/389 du 28 novembre 2011.

Le Président de la République, décrète :

Chapitre I : Dispositions générales

Art. 1er

1- Le présent décret porte organisation et fonctionnement des organes de gestion du statut des réfugiés et en fixe les règles de procédure, en application de la loi N°2005/006 du 27 juillet 2005 portant statuts des réfugiés au Cameroun ci-après désignée « la loi ».

2- Il est établi auprès du ministère en charge des Relations extérieures :

– la commission d’éligibilité au statut de réfugié, ci-après désignée « la commission d’éligibilité » ;

– la commission des recours des réfugiés, ci-après désignée « la commission des recours ».

Chapitre II : Organisation et Fonctionnement

Section I : Composition

Article 2

1- La commission d’éligibilité est composée de huit (08) membres répartis comme suit :

– Président : un représentant du ministère chargé des relations extérieures ;

– Vice-président : un représentant du ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation ;

– Membres :

• Un représentant du ministère des Relations extérieures ;

• Un représentant du ministère des affaires sociales ;

• Un représentant et la délégation générale à la Sûreté nationale ;

• Un représentant de la gendarmerie nationale ;

• Un représentant de la direction générale de la recherche extérieure ;

• Un représentant de la commission nationale des droits de l’homme et des libertés

2- Un représentant du Haut-commissariat des Nations Unies pour les refugiés, ci-après désigné « HCR », assiste aux travaux en qualité d’observateur avec voix consultative.

3- Le président peut inviter toute personne, en raison de ses compétences, à assister aux travaux d’éligibilité avec voix consultative.

Article 3

1- La commission des recours est composée de cinq (05) membres répartis comme suit :

– Président : Un représentant de la présidence de la République ;

– Vice-président : un représentant des services du Premier ministre ;

– Membres :

• Un représentant du ministère de la justice ;

• Un représentant du ministère des Relations extérieures ;

• Un représentant du ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation.

2- Un représentant du HCR peut être invité à assister aux travaux en qualité d’observateur avec voix consultative.

Section II : Dispositions communes

Article 4 (nouveau)

1- Les propositions en vue de la nomination des membres de la commission d’éligibilité et de la commission des recours sont faites par les administrations et les institutions auxquelles ils appartiennent.

2- La composition de chaque commission est constatée par un acte du ministre des Relations extérieures.

3- Un suppléant est désigné dans les mêmes conditions pour remplacer le membre titulaire en cas d’empêchement provisoire ou d’indisponibilité temporaire.

4- Le mandat des membres et de trois (03) ans renouvelable une fois.

5- Aucun membre désigné ne peut appartenir à la fois à l’une et l’autre commission.

6- En cas de décès en cours de mandat ou dans toutes les hypothèses où un membre n’est plus en mesure d’exercer son mandat, il est pourvu à son remplacement pour la période du mandat restant à couvrir.

Article 5

1- Les membres des commissions prêtent serment avant leur entrée en fonction devant le Tribunal de Grande Instance.

2- Ils prêtent le serment suivant, en respectant les usages consacrés « je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect des lois et règlement, de garder le secret des délibérations de la commission d’éligibilité au statut des réfugiés, de la commission des recours des réfugiés » selon le cas.

3- Acte est donné de la prestation de serment par le président du Tribunal de Grande Instance et procès-verbal en est dressé.

Article 6

1- Les commissions se réunissent sur convocation de leurs présidents respectifs au moins une fois par mois et en cas de besoin lorsque les circonstances l’exigent.

2- Les commissions ne peuvent siéger et délibérer qu’en présence de la majorité absolue de leurs membres.

Article 7

1- Pour l’accomplissement de leurs missions, la commission d’éligibilité et la commission des recours disposent d’un secrétariat technique, ci-après désigné « le secrétariat technique ».

2- Le secrétariat technique est chargé de :

• L’enregistrement des demandes d’asile et des recours ;

• La préparation des dossiers à soumettre aux commissions ;

• L’acheminement des convocations aux sessions ;

• L’élaboration du projet de l’ordre du jour des sessions des commissions ;

• La rédaction des décisions et procès-verbaux des commissions ;

• La transmission des copies des décisions des commissions à toute autorité concernée ;

• La tenue et la conservation des dossiers des commissions ;

• La préparation des rapports de ses activités au ministère en charge des Relations extérieures et au HRC une fois par mois et chaque fois de besoin.

3- Les tâches du secrétariat technique sont assurées par le service en charge des réfugiés du ministère en charge des Relations extérieures, lequel bénéficie de l’appui du HCR.

Chapitre III : Des procédures

Section I : De l’éligibilité

Article 8

1- La commission d’éligibilité est saisie de toute demande en éligibilité et décide en premier ressort de l’octroi ou du refus du statut de réfugié au demandeur d’asile.

2- Toute demande d’asile est adressée au président de la commission d’éligibilité et elle est reçue par le secrétariat technique.
3- Les demandes déposées auprès des bureaux du HCR sont transmises au secrétariat technique.

4- Lorsque le HCR est saisi d’une demande d’asile, il peut assister le demandeur d’asile dans l’accomplissement des formalités y relatives.

Article 9

1- Dès l’enregistrement de la demanda d’asile au secrétariat technique, le dossier est instruit et transmis au président de la commission d’éligibilité.

2- En vue de l’instruction du dossier, le demandeur d’asile est convoqué au secrétariat technique pour entretien avec un agent dûment habilité chargé de procéder à toutes les investigations nécessaires et de recueillir toutes informations complémentaires utiles sur sa situation.

3- La convocation est adressée au demandeur d’asile au moins deux semaines avant la date de l’entretien.

4- Durant son entretien, le demandeur d’asile est assisté en cas de besoin, d’un interprète. Les frais ne sont pas à la charge du demandeur.

5- En cas d’audition d’un enfant non accompagné, la présence d’un assistant social est nécessaire.

6- L’audition d’une demanderesse d’asile doit être menée si celle-ci le souhaite, par un agent habilité de même sexe.

7- A l’issue de cet entretien et des investigations subséquentes, un rapport sur la demande d’asile est confectionné. Il contient l’exposé des faits, une analyse juridique fondée sur les instruments relatifs au statut du réfugié et un état de la situation sociale du demandeur d’asile.

8- Jusqu’à la transmission du dossier au président de la commission d’éligibilité, le secrétariat technique dispose pour l’instruction d’un délai de deux (02) mois renouvelable trois (03) fois.

Article 10

1- La commission d’éligibilité lorsqu’elle reçoit le dossier instruit, assorti du rapport du secrétariat technique sur la demande d’asile, d’un délai maximum de deux (02) mois pour statuer. Ce délai est renouvelable une fois.

2- La commission d’éligibilité peut ordonner la comparution personnelle du demandeur d’asile et prescrire toute autre mesure d’instruction utile.

Article 11

Lorsque la commission d’éligibilité est saisie des faits susceptibles de provoquer l’exclusion ou la perte du statut de réfugié en application des articles 3 et 4 de la loi, elle statue sur le cas, dans les conditions prévues par le présent décret et d’autres textes pertinents.

Article 12

En cas d’arrivée massive de personnes en quête d’asile, et notamment devant l’impossibilité matérielle de déterminer leur statut sur la base individuelle, la commission d’éligibilité pour décider de leur reconnaître le statut de réfugié prima facie sous réserve de vérifications ultérieures au cas par cas.

Section II : Des recours

Article 13

1- Toutes contestations de la décision de la commission d’éligibilité est portée devant la Commission des recours. La Commission des recours statue en dernier ressort.

2- Le recours est introduit auprès du secrétariat technique, directement ou par le canal des bureaux du HCR.

3- La commission des recours se prononce dans un délai maximum de deux (02) mois après sa saisine.

4- La commission des recours peut toute fois ordonner la comparution personnelle du demandeur d’asile et prescrire toute autre mesure d’instruction utile.

5- Le recours doit comporter l’exposé des moyens nouveaux invoqués et une copie de la décision de la commission d’éligibilité en cause.

6- L’introduction d’un recours suspend toute mesure d’expulsion nationale.

7- Les dispositions des alinéas 4, 5, 6 de l’article 9 ci-dessus s’appliquent à la procédure devant la commission des recours.

Article 14

Les procédures devant les commissions sont gratuites.

Section III : Des décisions

Article 15

1- Les décisions de chacune des commissions sont prises à la majorité simple des membres présents. En cas d’égalité des voix, celle du président est prépondérante.

2- Les décisions des commissions sont motivées. Elles sont notifiées à la diligence du Secrétariat technique.

3- Les délais de recours sont de trente (30) jours à compter de la notification.

Article 16

1- Dès la reconnaissance du statut de réfugié, le Secrétariat technique délivre au bénéficiaire, ainsi qu’à tous les membres mineurs et majeurs de sa famille au sens de l’article 5 de la loi, des attestations de réfugié qui leur permettront d’obtenir auprès des autorités compétentes des cartes de réfugiés visées par l’article 13al. 1 de la loi.

2- La durée de validité de la carte de réfugié est de deux (02) ans renouvelable suivant la règlementation en vigueur.

3- Sous réserves des dispositions de l’article 4de la loi, ladite carte est renouvelée de plein droit à son expiration.

Article 17

1- En cas de perte ou refus de statut de réfugiés, sauf raison impérieuse de sécurité nationale, un délai de (06) mois est accordée à l’intéressé pour trouver un pays d’accueil.

2- Toute personne ayant perdu la qualité de réfugié ou ne l’ayant pas obtenu et n’ayant pas quitté le territoire au terme du délai de six (06)mois visé à l’alinéa 1 ci-dessus, est, sauf cas de force majeure, considérée, comme un étranger en situation irrégulière au sens de la loi n°97/012 du 10 janvier 1997 fixant les conditions d’entrée, de séjour et de sortie des étrangers au Cameroun.

Chapitre IV : Des dispositions financières

Article 18

Les ressources des organes de gestion du statut des réfugiés au Cameroun proviennent :

– Des crédits inscrits annuellement au budget du ministère des Relations extérieures ;

– Des contributions du HCR ;

– Des dons et legs divers.

Article 19

1- Les fonctions du président, Vice-président et membres sont gratuites.

2- Toutefois, les présidents, vice-présidents, les membres, les personnalités invitées à titre consultatif, ainsi que le personnel du secrétariat technique, bénéficient d’une indemnité de session dont les montants sont fixés d’un commun accord par le ministère en charge des Relations extérieures et le HCR.

Chapitre V : Dispositions transitoires et finales

Article 20

Les titulaires de documents d’identification provisoirement délivré par le HCR disposent d’un délai de six (06) mois pour se conformer aux dispositions du présent décret.

Article 21

Le présent décret sera enregistré et publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au journal officiel en français et en anglais.

Yaoundé, le 28 novembre 2011

Le Président de la République, (é) Paul Biya.