Le siècle des lumières a fait émergé de nombreuses idées, valeurs et principes, dont certains ont trouvés une application directe dans des textes tels que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Pour d’autres en revanche, ils ont toujours été présents d’une manière plus ou moins claire et précise, mais n’ont jamais fait l’objet d’une consécration textuelle. Ceci c’est concrétisé par l’apparition de principes généraux du droit en matière de droit administratif. En effet, en droit administratif, les textes écrits ne constituent pas les seules sources du droit et un certains nombre de règles non écrites s’imposent au juge administratif comme aux administrés : ce sont les principes généraux du droit. Les principes généraux du droit constituent une norme juridique autonome, qui émane de l’esprit général de l’idée que l’on se fait de notre système juridique. Ils ne doivent pas être confondue avec les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qui sont des principes textuels. Leur autonomie résulte du fait qu’ils n’ont pas de lien formel avec un droit écrit et qu’ils ne tiennent pas leur force obligatoire d’un texte. Si ils ont aujourd’hui une force obligatoire, c’est donc qu’ils ont obtenus une reconnaissance de la part du juge administratif, ce qui ne fut pas toujours le cas.
Bien que les principes généraux du droit aient toujours existé, ils serait judicieux de savoir quand est-ce que ceux-ci ont été reconnus ?

I- Une législation parfois limitée, qui nécessite l’apparition de valeurs fondatrices

Les principes généraux du droit nécessitent une certaine démarche de la part du Conseil d’Etat pour leur donner une forme (A), et c’est par celle-ci qu’il créera principes généraux du droit fondateurs (B).
A)- Leur mode de création

Les principes généraux du droit sont mis en avant par le Conseil d’Etat, qui pour se faire s’inspire à la fois des dispositions législatives existante, de l’esprit juridique postérieur et actuel, mais aussi de textes tels que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ou encore du Préambule de la Constitution. De même, les dispositions des conventions internationales sont susceptibles d’être pour le juge administratif, une source d’inspiration Un certain nombre de principes généraux du droit sont issus de l’esprit de 1789, quand aux rapports entre les citoyens, ainsi que leur rapport avec l’autorité publique. La plus part des principes généraux du droit posent des règles issues de principes de philosophie politique, tels que le protection des libertés et les droits individuels, mais d’autres posent des règles de procédure et sont relatif, notamment, au fonctionnement de l’administration.

Bien que le Conseil d’Etat parle de principes généraux du droit qui sont rattachés ou garantis par le Préambule de la Constitution de 1958, un certain nombre ne le sont pas. En effet, le Conseil d’Etat constate simplement que leur existence se justifie par la réponse à un besoin de la vie sociale ou parce que les textes juridiques actuels ne suffisent pas.
B)- L’origine des PGD
C’est vers la fin du XIXe siècle, que l’on évoque pour la première fois les principes généraux du droit, avec l’arrêt Dugave et Bransiet du 8 février 1873, qui a été rendu le même jour que l’arrêt Blanco qui posa les bases du droit administratif. Bien que l’arrêt Téry du 20 juin 1913 évoque à son tour les les principes généraux du droit, leur véritable apparition débutera vers la fin de la seconde guerre mondiale avec l’arrêt Dame veuve Trompier-Gravier du 5 mai 1944, ou le Conseil d’Etat mentionne « le respect des droits de la défense ». Dans l’arrêt Aramu du 26 octobre 1945, le Conseil d’Etat affirme « qu’ils résulte des principes généraux du droit applicables même en l’absence de texte ». Cet arrêt Aramu marque la naissance des principes généraux du droit et affirme leur autonomie.

Le Conseil d’Etat, après avoir établit les premiers principes généraux du droit post seconde guerre mondiale, continuera sa tache pour donner des bases solides au droit administratif en multipliant les « naissances » (je parle de celles des PGD)

II- L’évolution des PGD

Depuis les premiers principes généraux du droit, leur nombre n’a cessé de croître, ainsi que leur diversité (A) quant aux domaines concernés. De plus leur place dans la hiérarchie des normes est parfois contestée (B), bien que les principes généraux du droit en tant que tel ne le sont pas.

A)- Leur diversité

La liste des principes généraux du droit est plutôt exhaustive et s’enrichie continuellement, cependant il est possible de les classer dans des grandes familles.

► Principes généraux du droit concernant les libertés : liberté d’aller et venir (arrêt du CE, Société Lucien et Cie. du 20 mai 1955), liberté du commerce et de l’industrie (arrêt du CE, Cie maritime auxiliaire d’outre mer, du 17 février 1967), etc.

► Principes généraux du droit concernant l’égalité : égalité devant la loi (arrêt du CE, Syndicat des propriétaires des forêts de chênes liège d’Algérie, du 7 février 1958), égalité devant les charges publiques, égalité devant l’impôt, égalité devant la justice, égalité qui régit le fonctionnement des services publics, etc.

► Principes généraux du droit concernant la sécurité : recours pour excès de pouvoir (arrêt Dame Lamotte du 17 février 1950), droit de la défense, les actes ne disposent que pour l’avenir, respect de la personne humaine après la mort, continuité des services publics etc.
► Principes généraux du droit particuliers : ce sont ceux qui concernent le statut de la fonction publique, le statut des juridictions et ceux attribués à des matières particulières (PGD plus récents).

B)- Leur place dans la législation

Les principes généraux du droit ont force obligatoire et le juge administratif peut juger l’annulation d’un acte administratif, si ils ne sont pas respectés. Avant 1958, la doctrine les considérés comme ayant une autorité égale à celle de la loi, bien que le juge administratif les faisaient prévaloir sur certaines loi comme dans l’arrêt Dame Lamotte du 17 février 1950.
Depuis la Constitution de 1958, le Conseil d’Etat affirme la subordination des règlements autonomes, aux principes généraux du droit, comme il le montre dans l’arrêt Syndicat des Ingénieurs Conseils du 26 juin 1959. Certains auteurs après cet arrêt leur ont accordés une valeur Constitutionnelle, car le Conseil d’Etat affirme que ces principes généraux du droit sont dans le préambule de la Constitution.
Le Conseil Constitutionnel distingue deux catégories de principes généraux du droit :
■ les PGD à valeur Constitutionnelle qui de rattachent au préambule de la Constitution de 1958.
■ les PGD à valeur législative.

Ce qui est reconnut par toutes les juridictions, c’est que les principes généraux du droit, quel que soit leur niveau, sont supérieurs aux règlements.
Plusieurs thèses s’opposent quant à leur place dans la hiérarchie des normes. En effet, selon le professeur Chapus, les principes généraux du droit ont une valeur infra-législative et supra-décrétale, car le juge administratif ne peut que constater des principes généraux du droit qui sont au niveau de sa hiérarchie, ors celui-ci est soumis à la loi. Cette approche de Chapus, fait l’objet de certaines critiques. En effet il est reproché à cette thèse de ne faire que décrire la place de la juridiction administrative dans les institutions françaises et non d’expliquer la réelle valeur juridique des principes généraux du droit. De plus sachant que le Conseil Constitutionnel a reconnut une valeur constitutionnelle à certains principes généraux du droit, il n’est pas judicieux de situer le Conseil d’Etat en dessous du Parlement.
Il faut noter par ailleurs que ces deux arguments se contredisent, car ils adoptent le même principe de raisonnement que le professeur Chapus, et c’est ce qui lui est reproché.