ORGANISATION DE LA MAITRISE D’ŒUVRE TECHNIQUE DANS LA REALISATION DES PROJETS D’INFRASTRUCTURE

 

DECRET N° 2014/3863/PM du 21 Novembre 2014.-

 

Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement décrète :

 

CHAPITRE I :

 DISPOSTIONS GENERALES

 

Article 1er. – Le présent décret organise la maîtrise d’œuvre technique dans la réalisation des projets d’infrastructure en vue de l’amélioration de la performance et de la gouvernance technique dans les différentes phases d’élaboration des études techniques et d’exécution des travaux.

 

Article 2. – Au sens du présent décret, la maîtrise d’œuvre  technique renvoie à l’ensemble des opérations qui consistent à assister les Maîtres d’Ouvrages dans la réalisation des différents projets d’infrastructures, en leur indiquant les étapes et l’itinéraire à suivre, tout en précisant les normes et spécifications techniques à observer par les intervenants de la chaîne d’élaboration des études techniques et d’exécution des travaux.

 

Article 3. – (1). – La maîtrise d’œuvre technique des projets d’infrastructures a pour but de renforcer la coordination des interventions et de garantir une meilleure cohérence dans les actions à mener, afin d’assurer la viabilité et la pérennité des différents types d’infrastructures à réaliser soit par l’Etat, les Collectivités Territoriales Décentralisées, les Etablissements et les Entreprises du secteur Public et Parapublic, soit par les personnes privées.

 

(2). – Elle concourt au renforcement du suivi de la maturation des projets d’infrastructures suivant les normes et procédures établies, les conditions déterminées et les paramètres fondamentaux que sont la qualité , la quantité, les délais et les coûts.

 

Article 4. – (1). – La maîtrise d’œuvre technique des projets d’infrastructures se fait dans le strict respect des lois et règlements en vigueur.

 

(2). – Elle est subordonnée à la validation préalable par les Administrations compétentes, des dossiers relatifs aux questions architecturales, environnementales et de planification urbaine.

 

(3). – Elle se fait également conformément aux règles et principes de la subsidiarité du secret défense et de la déontologie professionnelle, ainsi que suivant les exigences de la décentralisation.

Article 5. – La maîtrise d’œuvre technique des projets d’infrastructures est assurée par le Ministre chargé des Travaux Publics en sa qualité d’Ingénieur de l’Etat et Responsable de la Supervision et du Contrôle Technique de la Construction, de la Maintenance et de l’Entretien des Infrastructures et des Bâtiments Publics.

 

CHAPITRE II :

 DE LA NOMENCLATURE DES PROJETS D’INFRASTRUCTURES ET DES MISSIONS DU MAITRE D’ŒUVRE TECHNIQUE

 

SECTION I :

DE LA NOMENCLATURE DES PROJETS D’INFRASTRUCTURES

 

Article 6. – Les projets d’infrastructures concernés par la maîtrise d’œuvre sont notamment :

 

  • Les bâtiments et édifices publics ;
  • Les infrastructures routières ;
  • Les infrastructures portuaires et aéroportuaires ;
  • Les infrastructures ferroviaires et fluviales ;
  • Les infrastructures énergétiques et environnementales.

 

Article 7. – Les bâtiments et édifices publics comprennent les constructions civiles, résidentielles et institutionnelles, les infrastructures socio-éducatives, sportives et culturelles, les constructions commerciales et industrielles, les construction hôtelières, ainsi que les bâtiments  recevant le public construits par les privés et les entrepôts.

 

Article 8. – Les infrastructures routières et ferroviaires sont constituées entre autres des routes, des autoroutes, des lignes de voies ferrées, des transways et de métro, des voiries et des réseaux divers, des ouvrages d’art et des ouvrages stratégiques ou hydrauliques qui y sont réalisés.

 

Article 9. – Les infrastructures portuaires, aéroportuaires, ferroviaires et fluviales comprennent, notamment : les quais, les jetées, les chaussées aéronautiques, les terminaux, les bâtiments et équipements associés, les débarcadères, les digues de protection, les ouvrages de protection des berges et des cours d’eau, ainsi que les aménagements et ouvrages connexes.

 

Article 10. – Les infrastructures énergétiques et environnementales concernent les barrages, les aménagements hydro-électriques, les digues et lacs de retenue, les lignes de transport d’énergie électrique, les gazoducs, les oléoducs, les cuves de stockage et les infrastructures spéciales et stratégiques.

 

SECTIION II :

 DES MISSIONS DU MAITRE D’ŒUVRE TECHNIQUE

 

Article 11. – (1). – Le Maître d’œuvre Technique est responsable de la construction, de l’entretien et de la maintenance des infrastructures, en liaison avec les Maîtres d’Ouvrage concernés.

 

(2). – Il veille à la bonne exécution des études et des travaux dont il résout les problèmes récurrents  d’immaturité des projets d’infrastructures qui, soit compromettent la réalisation conforme des travaux sur les plans techniques et financiers, soit plombent les travaux et le rythme d’exécution des projets.

 

Article 12. – (1). – Le Maître d’œuvre peut, le cas échéant, déléguer certaines activités à des structures privées, suivant les procédures de contractualisation règlementaires, en vue de la réalisation  d’une mission de maîtrise d’œuvre partielle ou complète.

 

(2). – Dans ce cas, le Maître d’œuvre Délégué assure, sous la supervision du Maître d’œuvre, le suivi des travaux comprenant l’ordonnancement, le pilotage et la coordination. Il assiste le Maître d’Ouvrage dans la réception des travaux avec les entreprises qui les ont exécutés, et rédige les procès-verbaux de réception avec ou sans réserves.

 

Article 13. – Dans la réalisation de tout projet d’infrastructure, le Maître d’œuvre s’assure de la bonne application des normes établies en matière d’études techniques, de construction, d’entretien et de maintenance de ces infrastructures.

 

Article 14. – (1). – Le Maître d’œuvre élabore, en liaison avec les Maîtres d’Ouvrages concernés, les études techniques nécessaires à la mise en œuvre des projets d’infrastructures envisagés.


 

(2). – Il vérifie et procède à la validation des études techniques des projets d’infrastructures, en liaison avec les structures concernées.

 

Article 15. – Le Maître d’œuvre est responsable de la surveillance des travaux d’infrastructures.

 

A ce titre, il assure notamment :

 

  • La validation du projet d’exécution des entreprises ;
  • La préparation et la notification de certains ordres de service ;
  • La supervision et le contrôle technique de l’exécution des travaux de construction ou d’entretien conformément aux normes établies ;
  • La préparation des aspects techniques des réunions de chantier ;
  • L’émission des avis techniques sur les ouvrages ;
  • La prise en attachement des travaux convenablement exécutés ;
  • La transmission aux Maîtres d’Ouvrages pour paiement, des décomptes revêtus de son visa.

 

Article 16. – Le Maître d’œuvre joue le rôle d’appui-conseil et d’interface dans le suivi des activités des différentes missions d’assistance et de contrôle impliquées dans les projets d’infrastructures, afin d’assurer le respect des cahiers des clauses par les titulaires, les délégataires ou les concessionnaires.

 

CHAPITRE III :

 DES ACTIVITES ET DES MODALITES D’EXECUTION DELA MAITRISE D’ŒUVRE TECHNIQUE

 

Article 17. – (1). – Le Maître d’œuvre assure le respect des procédures et des normes à toutes les phases de maturation des projets.

 

(2). – Il examine et approuve la qualité de l’ensemble des rapports élaborés par les prestataires  ou les partenaires.

 

(3). – Il donne, le cas échéant, des avis techniques pertinents pour éclairer les Maîtres d’Ouvrages sur les manquements relevés.

 

Article 18. – (1). – Le processus de contractualisation suivant le régime applicable aux contrats de partenariat public-privé ou de mise en œuvre des projets financés par la coopération bilatérale ou multilatérale ne peut être déclenché qu’après la réalisation des études de faisabilité et, au moins, sur la base des Etudes d’Avant-Projet Sommaire disponibles.

 

(2). – L’avis préalable du Maître d’œuvre doit toujours être requis et obtenu.

 

Article 19. – Les phases obligatoires à respecter pour la maturation des projets d’infrastructures constituent le cycle de gestion normale d’un projet d’infrastructure. Il s’agit notamment de :

 

  • La phase d’instruction ;
  • La phase de formulation et de montage ;
  • La phase de conception comprenant les études techniques et l’élaboration des dossiers de consultation des entreprises ou des dossiers d’exécution ;
  • La phase d’exécution des travaux avec mission de surveillance partielle ;
  • La réception et la mise en service.

Article 20. – La phase d’instruction est celle qui permet au Maître d’Ouvrage d’initier et de concevoir le projet d’infrastructure, tout en procédant aux études d’opportunité et de préfaisabilité.

 

Article 21. – La phase de formulation et de montage du projet permet de réaliser les études de faisabilité, de définir le coût objectif et global du projet, d’élaborer le mode et le plan de financement, ainsi que d’établir le chronogramme indicatif de mise en œuvre.

 

Article 22. – La phase des études techniques et d’élaboration des dossiers de consultation des entreprises ou des dossiers d’exécution comprend notamment :

 

  • Les études d’Avant-Projet Sommaire et les études d’Avant-Projet Détaillé ;
  • La mise en place du Maître d’œuvre privé ou le représentant du Maître d’Ouvrage dans le cas des projets Engineering Procurement Construction (EPC) ou Partenariat Public Privé (PPP) ;
  • La réalisation des études techniques détaillées et le suivi des procédures ;
  • La consultation des entreprises, le cas échéant ;
  • La sélection des partenaires privés ou des concessionnaires.

 

Article 23. – La phase d’exécution des travaux est celle de mise en œuvre opérationnelle du projet, marquée l’élaboration des projets d’exécution, la préparation de chantier, la mobilisation des moyens et l’exécution proprement dite des travaux, y compris les contrôles internes et externes à effectuer.

 

Article 24. – La phase de réception et de mise en service est celle au cours de laquelle il est procédé à la vérification  de la conformité des infrastructures réalisées, l’établissement du dossier de recollement, la production du manuel d’exploitation et d’entretien de l’ouvrage, ainsi que la réception  provisoire et définitive qui matérialisent la prise en possession et la mise en exploitation.

 

SECTION II :

 DES MODALITES D’ASSISTANCE DES MAITRES D’OUVRAGES PAR LE MAITRE D’ŒUVRE TECHNIQUE

 

Article 25. – Le Maître d’œuvre assure l’assistance aux Maîtres d’Ouvrages ou aux Concessionnaires, en vue de la réalisation des projets d’infrastructures à financement interne, de la coopération internationale ou du partenariat public privé.

 

Article 26. – (1). – L’assistance aux Maîtres d’Ouvrages  requiert pour le Maître d’œuvre, de consolider la définition exacte des besoins pour répondre aux usages spécifiés des infrastructures envisagées.

 

(2). – Le Maître d’œuvre doit également garantir la pertinence et l’adéquation des termes de référence pour la réalisation des missions ou des études envisagées, ainsi que la qualité des dossiers d’appel d’offres pour les études.

 

Article 27. – (1). – Dans le cadre de l’assistance aux Maîtres d’Ouvrages, le Maître d’œuvre est tenu de s’assurer de la clarté et de la cohérence des Cahiers des Clauses Techniques et Particulières, ainsi que des Spécifications Techniques Détaillées.

 

(2). – Il doit également veiller à l’application des règles relatives à l’utilisation des matériaux locaux dans la construction des bâtiments publics de niveau R et R+1, ainsi qu’aux techniques de la Haute Intensité de Main d’œuvre (HIMO).

 

Article 28. – L’assistance aux Maîtres d’Ouvrages dans la réalisation des projets d’infrastructures implique la vérification de la fiabilité de l’expertise technique des prestataires ou des consultants devant effectuer les études, le contrôle de la conformité du contenu des rapports des études techniques et l’émission des avis sur les cahiers de clauses techniques des différents  projets de marché.

 

SECTION III :

 DE LA REALISATION DES ETUDES PAR LE MAITRE D’ŒUVRE TECHNIQUE

 

Article 29. – Les études en vue de la réalisation des projets d’infrastructures, quelles que soient leur nature, leur taille et leur complexité, y compris ceux envisagés dans le cadre de la coopération internationale, sont éligibles à l’exécution des travaux en régie.

 

Article 30. – Les Maîtres d’Ouvrages concernés par la réalisation des projets d’infrastructures doivent associer le Maître d’œuvre dans la phase de définition et d’élaboration des termes de référence y relatifs. A cet effet, ils lui confient les études dans le cadre d’une mission de collaboration technique, qu’il s’agisse des travaux neufs ou des travaux de réhabilitation.

 

Article 31. – En prélude à la réalisation des études techniques proprement dites, le Maître d’œuvre doit produire au Maître d’Ouvrage un plan d’action de la mission de collaboration technique comprenant entre autres :

 

  • La note méthodologique et le chronogramme réaliste pour l’exécution de la mission ;
  • Le planning d’exécution des tâches séquentielles ;
  • La définition de la nature et la qualité des rapports à produire ;
  • La séquence de présentation et de validation des rapports d’études ;
  • Les modalités d’approbation desdits rapports.

 

Article 32. – (1). – Toute étude à réaliser dans le cadre d’un projet d’infrastructure doit préciser les moyens de mise en œuvre de la mission. Ces moyens concernent notamment :

 

  • L’organigramme de l’équipe du projet précisant les noms, prénoms, poste de responsabilité dans le projet, les qualifications ;
  • Les fonctions au sein de l’Administration ;
  • La liste des matériels et des équipements à mobiliser pour l’étude ;
  • Le planning d’intervention des Ingénieurs mobilisés.

 

(2). – Elle doit également préciser outre les sources de financement et le planning prévisionnel des dépenses, les étapes d’organisation des sessions des commissions de suivi et de recette technique pour la validation des différents rapports contenant les pièces graphiques et les pièces écrites.

 

Article 33. – Les prestations exécutées par le Maître d’œuvre doivent aboutir à la production des avant-projets sommaires et détaillés, des cahiers des clauses techniques particulières, des spécifications techniques détaillées, des projets d’exécution de l’ouvrage et des dossiers d’appel d’offres pour engager le processus de la commande.

 

Article 34. – En ce qui concerne les projets relevant des coopérations internationales, les Maîtres d’Ouvrages sont tenus d’associer le Maître d’œuvre lors des phases d’initiation et de formulation, ou de requérir son avis technique préalable, avant toute signature d’un document engageant le Gouvernement pour la réalisation desdits projets.

 

Article 35. – (1). – Dans le cadre de la maîtrise d’œuvre déléguée, le Maître d’œuvre reste notamment responsable de la supervision et de la validation de conformité non seulement des prestations des Maîtres d’œuvre délégués, mais celle des Bureaux de Contrôle Techniques.

 

(2). – Il vérifie en outre le respect des cahiers des clauses techniques particulières, des spécifications techniques détaillées, des normes et standards retenus, du planning d’exécution des travaux, ainsi que la conformité de l’ensemble de l’exécution des travaux.

 

CHAPITRE IV :

 DU CADRE DE COLLABORATION TECHNIQUE ENTRE LE MAITRE D’ŒUVRE TECHNIQUE ET LES MAITRES D’OUVRAGES

 

Article 36. – Le Maître d’œuvre assure sa mission au bénéfice des Maîtres d’Ouvrages en obéissant à la logique de planification et de programmation des ressources destinées au financement de la réalisation des projets d’infrastructures.

 

Article 37. – Dans le cadre de leur collaboration technique, les relations entre le Maître d’œuvre et les Maîtres d’Ouvrage doivent fortement être celles de complémentarité, en vue de l’exécution  de services publics, sans qu’il n’existe un lien quelconque de subordination.

 

Article 38. – Le Maître d’œuvre peut mettre à disposition, de façon ponctuelle ou permanente, et sur demande du Maître d’Ouvrage, un ou plusieurs de ses collaborateurs pour le suivi efficace et efficient de la réalisation de certains projets d’infrastructures.

 

Article 39. – (1). – Le Maître d’Ouvrage, bénéficiaire ou exploitant des infrastructures  à réaliser, définit les besoins et en précise les orientations stratégiques.

 

(2). – Lorsque le Maître d’Ouvrage dispose d’une structure technique qui assure la formulation et le suivi de la réalisation des projets d’infrastructures relevant de son ressort de compétence, ladite structure collabore avec  le Maître d’œuvre.

 

Article 40. – (1). – Les structures techniques placées auprès des Maîtres d’Ouvrages doivent être considérées comme des Services Avancés du Maître d’œuvre, mis à leur disposition dans le but de garantir meilleure définition des projets d’infrastructures.

 

(2). – Les Services visés à l’alinéa (1) ci-dessus font partie intégrante de l’équipe du Maître d’œuvre et contribuent à la bonne exécution  des prestations envisagées  pour l’exécution des études en régie, la réalisation de mission de maîtrise d’œuvre dans le cadre de l’exécution des travaux et l’assistance  aux Maîtres d’Ouvrages.

 

Article 41. – Le Maître d’œuvre transmet ses rapports de prestation à chaque Maître d’Ouvrage, accompagnés de notes conjoncturelles et des propositions de recommandations ou d’éléments de prise de décision.

 

CHAPITRE V :

 DISPOSTIONS DIVERSES, TRANSITOIRES ET FINALES

 

Article 42. – Les Maîtres d’Ouvrages disposent d’un délai de trois (03) mois, à compter de la date de signature du présent décret, pour faire parvenir systématiquement au Ministère en charge des Travaux Publics, pour examen et avis préalables, l’ensemble des dossiers techniques de leurs projets d’infrastructures, en phase d’instruction ou en cours d’exécution, afin de lui permettre de constituer une base de données et de les archiver.

 

Article 43. – Des textes particuliers du Ministre chargé des Travaux Publics précisent, en tant que de besoin, les modalités d’application du présent décret.

 

Article 44. – Le présent décret sera enregistré, publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au Journal Officiel en français et en anglais.

 

Yaoundé, le 21 Novembre 2014

Le Premier Ministre,

Chef du Gouvernement,

(é) Philemon YANG