Jean-Baptiste Baskouda, ce kirdi bon teint est connu comme l’un de ceux, dans le département du Mayo-Sava, à avoir cherché à briser l’ordre établi. Il n’a d’ailleurs jamais fait mystère de son ambition de jouer les premiers rôles dans ce territoire où règnent en maîtres quasi absolus des fortes personnalités comme le président de ‘Assemblée nationale Cavaye Yeguié Djibril, le ministre d’Etat chargé de la Justice, Garde des Sceaux, Amadou Ah, le député maire de Mora, El Hadj Abba Boukar… Belles brochettes de personnalités qui n’entendent d’ailleurs pas céder leur strapontin de sitôt. Et s’il faut ajouter à ceci le traditionnel jeu des équilibres politico-ethniques, c’est dire si l’ambition, légitime au démeurant de ce quadragénaire, ne ressemble pas tout simplement à une grosse chimère.

Pourtant ce ne sont pas les qualités qui manquent à l’actuel secrétaire général du ministère de l’Agriculture. Pris sous son aile par le vénérable et vénéré Baba Simon de son vrai nom Simon Mpecke de regretté mémoire, Jean-Baptiste Baskouda a connu une scolarité sans histoires à la mission catholique de son Tokombéré natal. Encouragé par son mentor, il quitte les montagnes pour se rendre à Ngaoundéré, au célèbre collège Mazenod qui aura vu passer une bonne frange de l’élite de toute la partie septentrionale du Cameroun. Il y obtient son baccalauréat A4 en 1976. Toujours sous la houlette de Baba Simon dont l’action pour l’émancipation des kirdis reste immense, Jean-Baptiste Baskouda s’inscrit à l’université de Yaoundé et sort nanti d’une licence en sciences économiques options Etudes et analyses. Il décroche en 1982 son entrée à la très courue Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM) d’où il en sort deux ans plus tard avec le statut d’inspecteur du travail. Commence dès ce moment pour lui une carrière qui le conduira très tôt et assez jeune vers les sommets. Après Edéa son premier poste d’affectation, retour au pays natal à Tokombéré, cette fois-ci comme administrateur municipal de la localité. Nous sommes en 1985. Il n’y reste que quelques semaines puis qu’à la faveur du remaniement gouvernemental du 24 août 1985, il est nommé secrétaire d’Etat à l’Administration territoriale chargé de l’administration pénitentiaire. Les camerounais découvrent alors un frêle jeune homme à la limite timide. Normal, Il a 27 ans. Pendant trois ans, il a le temps de se frotter à l’univers pas toujours reluisant des prisons et autres lieux de détention de la République avant de se voir appeler en 1988 sous les lambris dorés du palais de l’Unité comme directeur adjoint du cabinet civil de la présidence de la République, qu’il quitte après quatre ans pour regagner son administration d’origine. Ce sera pour une très courte durée puisqu’il regagne la présidence de la République, cette fois-là comme conseiller technique en charge des affaires organiques. A partir de ce moment sans qu’on sache trop ni comment, ni pourquoi, l’étoile de ce digne fils kirdi cesse subitement de briller. Certaines personnes tentent d’expliquer cette soudaine traversée du désert par “l’égo démesurée de ce jeune homme, son ambition dévorante et sa soif de pouvoir et, surtout, sa trop grande guelle et son esprit par trop indépendant”. Ce qui, si cela était avéré, serait beaucoup trop dans un environnement sociopolitique où on n’aime pas trop ceux qui rament à contre-courant du politiquement correct. Surtout quand ils font partie du sérail. Fier de ses origines, il crée dans l’intervalle la Dynamique Culturelle Kirdi (Dck) et commet dans le même temps un ouvrage au titre évocateur “Kirdi est mon nom” dans lequel il s’évertue à tordre le cou à certaines idées reçues et à rétablir quelques vérités historiques. Reconnaissant à celui qui lui aura mis le pied à l’étrier ainsi qu’à tous ses frères kirdi, il consacre une biographie à l’abbé Simon Mpecke: “Baba Simon: le père des Kirdis”. Hommage posthume à un inlassable ouvrier de l’Eglise catholique qui sera peut être le premier prêtre camerounais à être canonisé. La Procédure suit son cours. Et selon certaines indiscrétions glanées auprès de quelques membres du clergé, ce procès en canonisation devrait logiquement aboutir. Revenons à Jean-Baptiste Baskouda qu’on retrouve en 1995 au ministère des Mines, de l’eau et de l’énergie au poste de secrétaire général, puis au ministère de l’Environnement et des forêts en 2001 et depuis 2003 au ministère de l’Agriculture toujours au poste de secrétaire général. En attendant… Membre suppléant du comité central du Rdpc, ancien conseiller municipal de la commune rurale de Tokombéré, JeanBaptiste Baskouda n’aura pas trop de ses 47 ans -il est né vers 1957- pour revenir au devant de la scène. Son épouse et ses six enfants en seront, c’est sûr, les premiers heureux.

Bienvenue a l’extrême-Nord

Radioscopie d’une province et de ses personnalités incontournables

Aimé Robert BIHINA

Eric Benjamin LAMERE