Loi n° 2003/007 du 10 Juillet 2003 régissant les activités du sous-secteur engrais au Cameroun
L’Assemblée nationale a délibéré et adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
TITRE 1 : DISPOSITIONS GÉNÉRAILES
Article 1er :
(1) La présente loi régit le sous-secteur engrais au Cameroun. A ce titre, elle vise :
– l’augmentation de la productivité des exploitations et l’accroissement de la production agricole ;
– la gestion durable des ressources naturelles.
(2) Son champ d’application couvre les activités suivantes : la production, l’importation, l’exportation, le conditionnement, la distribution et l’utilisation des engrais.
(3) La présente loi s’applique à toutes sortes d’engrais, notamment les engrais minéraux, les engrais organiques et les engrais biologiques.
(4) Les activités du sous-secteur engrais définies à l’alinéa (2) ci-dessus peuvent être exercées simultanément ou séparément.
Article 2 : Pour l’application de la présente loi et des textes réglementaires qui en découlent les définitions ci-après sont admises :
Administration compétente : administration en charge de l’agriculture.
Engrais : toute substance ou matière contenant un ou plusieurs éléments nutritifs des plantes reconnus et utilisés comme tels dans le but de favoriser la croissance et la production des plantes.
Etiquette : indication de tout ce qui se trouve sous la forme écrite, imprimée ou graphique sur l’emballage immédiat ou lors d’un message spécifique à un engrais.
Enregistrement : inscription d’une personne physique ou morale exerçant une activité dans le sous-secteur engrais au Cameroun.
Production : fabrication des engrais.
Conditionnement : mélange et ensachage des engrais.
Distributeur : toute personne physique ou morale qui assure la fourniture ou la vente d’engrais en gros ou en détail au Cameroun.
Sous-Secteur engrais : domaine du secteur agricole où s’exercent les activités de recherche, d’encadrement et de réglementation en matière de fertilité et de fertilisation des sols, de production, d’importation, d’exportation, de conditionnement, de distribution et d’utilisation des fertilisants et où interfèrent des acteurs qui contribuent à asseoir une meilleure productivité des sols dans le cadre d’une gestion durable.
Article 3 :
(1) Les activités du sous-secteur engrais régies par la présente loi et définies à l’article 1er ci-dessus s’exercent sous le contrôle de l’Etat. A cet égard, l’administration compétente précise les normes techniques admises en la matière et assure le contrôle de la qualité des engrais.
(2) Les activités de recherche en matière des engrais restent soumises aux lois et règlements en vigueur
TITRE IL : DE L’EXERCICE DES ACTIVITES DU SOUS-SECTEUR ENGRAIS
CHAPITRE I : DES CONDITIONS D’EXERCICE DES ACTIVITES DE PRODUCTION, D’IMPORTATION, D’EXPORTATION, DE DISTRIBUTION ET D’UTILISATION DES ENGRAIS
Article 4 : La liberté d’exercer chacune des activités de production, d’importation et de distribution clans le sous-secteur engrais sur le territoire national est reconnue à toute personne physique ou morale, sous réserve du respect des lois et règlements
Article 5 : Les modalités d’exercice des activités de production, d’importation, d’exportation, de conditionnement, de stockage et de distribution des engrais ou de toute autre activité connexe sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de l’Agriculture, du ministre chargé du Commerce, du ministre chargé de l’Environnement et des Forêts et du ministre chargé de la Santé publique.
CHAPITRE II : DES CONDITIONS D’UTILISATION DES ENGRAIS
Article 6 :
(1) L’utilisation intensive d’engrais dans une exploitation agricole est soumise à une évaluation préalable de l’état physique et chimique du sol.
(2) Les modalités et le contenu de cette évaluation sont fixés par voie réglementaire.
Article 7 :
(1) Toute personne physique ou morale, publique ou privée, possédant une exploitation agricole et utilisant intensivement les engrais est tenue de procéder régulièrement à une évaluation de l’impact des engrais sur l’exploitation et l’environnement
(2) Les modalités de cette évaluation d’impact sont fixées par voie réglementaire.
Article 8 : Toute personne physique ou morale, publique ou privée qui utilise les engrais a l’obligation de veiller à ce qu’ils correspondent en quantité et en qualité, aux normes fixées par l’administration.
CHAPITRE III : DE L’INSPECTION ET DU CONTROLE DE LA QUALITE DES ENGRAIS
Article 9 :
(1) Il est institué un contrôle des engrais en vue de s’assurer de leur qualité. Ce contrôle comprend outre l’inspection des usines de production, de conditionnement et des dépôts de distribution des engrais, le prélèvement des échantillons pour les analyses en laboratoire.
(2) Le contrôle de la qualité des engrais est assuré par les agents assermentés relevant de l’administration compétente. Ces agents ont libre accès aux installations de production, d’entreposage, de conditionnement et de distribution des engrais.
(3) Les procédures de contrôle, de prélèvement et d’analyse des échantillons sont fixées par voie réglementaire.
Article 10 : Les conditions de commercialisation des engrais doivent répondre aux normes générales définies par arrêté conjoint du ministre charge de l’Agriculture, du ministre chargé du Commerce, du ministre chargé de l’Environnement et des Forêts et du ministre chargé de la Santé publique.
Article 11 : Les modalités d’analyse des échantillons d’engrais occasionnées par le contrôle sont fixées par voie réglementaire.
CHAPITRE IV : DE L’INSPECTION ET DU CONTROLE DE L’UTILISATION DES ENGRAIS
Article 12 :
(1) Il est institué un contrôle des exploitations agricoles utilisant intensivement les engrais.
(2) Les modalités de ce contrôle sont fixées par voie réglementaire.
Article 13 : Le contrôle de l’utilisation des engrais est assuré par des agents assermentés dans les conditions fixées à l’alinéa 2 de l’article 9 ci-dessus.
TITRE III : DU DÉVELOPPEMENT DU SOUS-SECTEUR ENGRAIS
Article 14 :
(1) Des mesures incitatives peuvent être prises en tant que de besoin, notamment dans les domaines financier, fiscalo-douanier et d’acquisition d’équipement, afin de promouvoir les investissements privés dans le sous-secteur des engrais.
(2) Des aides indirectes au développement du sous-secteur engrais peuvent être accordées par l’Etat pour faciliter la formation du personnel dans le domaine des engrais.
Article 15 : En vue de promouvoir le développement du sous-secteur engrais sur l’ensemble du territoire national, il est créé un compte d’affectation spéciale conformément aux dispositions des articles 39 et 41 de l’ordonnance n° 62/OF/4 du 7 février 1962 relative au régime financier de I’Etat.
Article 16 :
(1) Le compte prévu à l’article 15 ci-dessus est alimenté par :
– les -intérêts générés par les fonds fiduciaires du Programme de réforme du sous-secteur engrais (PRSSE) ;
-la contribution des acteurs du sous-secteur fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de l’Agriculture et du ministre chargé des Finances ;
– les contributions des donateurs internationaux ;
– toutes autres contributions prévues par la loi ;
– les dons et legs.
(2) Un décret du Président de la République fixe les modalités d’organisation et de fonctionnement du compte d’affectation spéciale prévu à l’article 15 ci-dessus.
TITRE IV : DES INFRACTIONS ET DES SANCTIONS
Article 17 : Constituent des infractions à la présente loi et à ses textes d’application :
– la production, la distribution et/ou l’utilisation d’engrais non conformes aux dispositions réglementaires ;
– la production, la distribution et/ou l’utilisation d’engrais contenant des substances nocives ou des propriétés nuisibles, même utilisées à des doses prescrites et pouvant porter atteinte au développement des plantes, à la santé humaine, animale et à l’environnement ;
– le refus de se prêter aux formalités d’enregistrement et de soumettre les engrais ou documents y afférents au contrôle de qualité ;
– le refus de se soumettre aux procédures de contrôle de l’utilisation des engrais.
Article 18 :
(1) Sans préjudice de la responsabilité civile susceptible d’être engagée et nonobstant certaines sanctions administratives prévues par la loi n° 90/031 du 10 août 1990 régissant l’activité commerciale au Cameroun pouvant être prises par le ministre chargé de l’Agriculture à l’encontre des personnes exerçant les activités régies par la présente loi, toute personne reconnue coupable des infractions prévues à l’article 17 ci-dessus est punie d’une peine d’emprisonnement d’un (1) à cinq (5) ans et d’une amende de cinquante mille (50 000) FCFA à cent millions (100 000 000) FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement.
(2) En cas de récidive, les peines prévues à l’alinéa (1) ci-dessus sont doublées.
Article 19 : Les sanctions prévues par la présente loi s’appliquent sans préjudice des dispositions du code pénal.
Article 20 : Outre les sanctions citées à I’article 18 ci-dessus, l’engrais mis en cause peut être :
– refoulé hors des frontières nationales, aux frais de l’importateur ou du distributeur dans le cas d’une importation ;
– saisi et détruit s’il est réputé dangereux, suivant des techniques préservant l’environnement aux frais du contrevenant ;
– déclassé.
Article 21 :
(1) Sans préjudice des prérogatives reconnues au ministère public et aux officiers de police judiciaire à compétente générale, les agent assermentés de l’administration compétente sont chargés de la recherche, de la constatation et de la poursuite en impression des infractions aux dispositions de la présente loi.
(2) Dans l’exercice de leurs fonctions, les agents assermentés sont tenus de se munir de leur carte professionnelle.
Article 22 : Toute autre infraction non prévue dans les dispositions de la présente loi et des textes pris pour son application relève du droit commun.
Article 23 :
(1) Toute infraction constatée fait l’objet d’un procès-verbal régulier. La recherche et la constatation des infractions sont effectuées par procès-verbal. Ces deux (2) agents qui cosignent le procès-verbal. Ce procès-verbal fait foi jusqu’à inscription en faux.
(2) Le procès-verbal ainsi établi est contresigné par le mis en cause. En cas de refus de ce dernier, mention en est faite en marge de celui-ci.
Article 24 :
(1) Tout procès-verbal de constatation d’infraction est notifié au contrevenant par tout moyen laissant trace écrite.
Celui-ci dispose d’un délai de vingt (20) jours à compter de cette notification pour le contester. Passé ce délai toute contestation devient irrecevable.
(2) La contestation est introduite auprès de l’administration chargée des Engrais qui se prononce dans un délai de quinze (15) jours suivant la réception de la requête. Passé ce délai la requête est supposée avoir reçu une suite favorable et le procès-verbal de constatation de l’infraction devient caduc.
(3) Si à l’examen de la contestation par l’administration chargée des Engrais la requête s’avère fondée, il y est fait droit et le procès-verbal de constatation de l’infraction classé. Dans le cas contraire, l’administration chargée des Engrais procède à des poursuites judiciaires conformément à la législation en vigueur.
Article 25 :
(1) Les infractions à la présente loi et aux textes pris pour son application peuvent donner lieu à une transaction entre l’administration chargée des Engrais et le contrevenant si ce dernier en fait la demande.
(2) La transaction susvisée est enregistrée aux frais du contrevenant et éteint l’action publique lorsqu’elle aboutit avant le prononcé de la décision au fond par la juridiction compétente.
(3) Les amendes résultant de la transaction prévue ci-dessus obéissent au même régime de recouvrement que les amendes prononcées par les juridictions de droit commun.
TITRE V : DES DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES
Article 26 : Les différents intervenants du sous-secteur engrais disposent du délai d’un (1) an pour se conformer aux dispositions de la présente loi à compter de la date de sa promulgation.
Article 27 : Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à la présente loi.
Article 28 : La présente loi sera enregistrée et publiée suivant la procédure d’urgence, puis insérée au Journal Officiel en français et en anglais.
Yaoundé, le 10 Juillet 2003
Le Président de la République,
(é) Paul Biya