La décentralisation comme transfert de compétences administratives de l’Etat vers les collectivités territoriales décentralisées, crée à côté de l’administration publique d’Etat, une administration publique décentralisée, rendant inéluctable l’émergence d’un corps d’administrateurs que sont les maires.
Si en l’état actuel du droit, la rétribution du maire et de ses adjoints n’est pas proportionnelle aux obligations statutaires, il reste qu’aucun débat n’est permis eu égard aux exigences déontologiques de ces édiles, dont l’une d’elle est l’obligation de résidence au chef lieu de la commune, entendue comme une nécessité de service (I) et comme une obligation légale (II)
I. L’obligation de résidence de l’exécution communale : une nécessité de service
Il est admis qu’on peut gouverner de loin, mais on n’administre que de près
Le maire est un administrateur municipal. Le terme était d’ailleurs en vogue avant l’appellation actuelle de maire pour les communes rurales.
Dans un arrondissement, le maire incarne l’administration décentralisée alors que le sous-préfet est l’archétype de l’administration déconcentrée. Le premier gère les intérêts locaux tandis que le second gère les intérêts nationaux et l’unicité de l’Etat.
L’institution du sous-préfet maire relève d’un passé lointain et n’a plus qu’un intérêt historique. Qui plus est, le sous-préfet n’as pas compétence sur les matières qui relèvent de l’exécutif communal. Le préfet, autorité de tutelle, réside au chef lieu de la préfecture, loin du maire. Même lorsqu’il réside dans la même ville que le maire, il ne peut pas initier des actions relevant de ce dernier, sans restreindre l’autonomie de la commune donc, porter atteinte à la décentralisation.
Le système administratif camerounais d’arrondissement, composé de deux têtes de proue, le maire et le sous-préfet, fonctionnent comme deux rivières qui coulent côte à côte, dans la même localité, sans se toucher en amont, tout en servant de breuvage pour les mêmes animaux en aval. La rive droite de l’une est en communication avec la rive gauche de l’autre par une voie à travers laquelle les mêmes populations font un va et vient entre les deux rivières, à la recherche de leur bien être économique, social, sanitaire, éducatif, culturel et sportif. Les deux rivières ne se touchent réellement qu’, au moment de se jeter dans le fleuve qu’est la préfecture.
En effet, aux termes des dispositions de l’article 67 de la loi N°2004/017 du 22 juillet 2004 d’orientation de la décentralisation, le préfet assure la tutelle de l’Etat sur la commune. Le Gouverneur et le préfet sont seuls habilités à s’exprimer au nom de l’Etat devant les conseils des collectivités territoriales de leur circonscription ; et en cas d’empêchement, ils peuvent déléguer un fonctionnaire des services du Gouverneur ou de la préfecture. Cela signifie que le préfet ne peut pas déléguer cette fonction au sous-préfet. Un vide causé par le maire apparaît donc comme un véritable déni d’administration pour les populations de l’arrondissement.
Enfin, le maire est bel et bien une autorité administrative au sens d’auctoritas, qui signifie augmenter, ajouter l’efficacité. Comment un maire pourrait-il augmenter l’efficacité de sa ville s’il n’y réside pas en permanence, tel le gardien de la ville, veillant sur tout. Il apparaît d’ailleurs à l’observation, que les maires qui augmentent le bien-être de leur ville au cours de leur mandat, sont ceux qui y résident effectivement, prennent la vraie mesure des problèmes. La résidence effective des maires s’entend aussi comme une obligation légale.
II. La résidence effective de l’exécutif communal : une obligation légale
La commune a un chef lieu qui est déterminé dans le décret de création.. En cas d’abandon des populations par un maire pendant son mandat, celles-ci sont résignées et n’attendent que la fin du mandat pour pouvoir destituer le magistrat municipal défaillant en raison de ce que le constituant camerounais a proscrit le mandat impératif, mécanisme juridique qui permet aux populations de destituer leur maire en cours de mandat, pour faute lourde. C’est pourquoi le législateur camerounais a soumis le maire et ses adjoints à l’obligation de résidence en ces termes : « le maire et ses adjoints résident dans la commune » (article 58 de la loi d’orientation de la décentralisation).
Ainsi, le maire appartient à cette catégorie d’agents publics qui est régie par le principe énoncé par Léon Gambetta dans cette formule célèbre « se soumettre ou se démettre ». Dura lex, Sed lex,. La loi est dure, mais c’est la loi.
Dans un arrondissement, le sous préfet, le maire et le commandant de brigade font parties de ces hauts emplois dont les détenteurs sont condamnés à l’astreinte républicaine. Depuis la fable « des deux mulets » de la fontaine, on sait qu’il n’est pas toujours bon d’avoir un haut emploi de peur d’en être malade.
Deux mulets cheminaient, l’un d’avoine chargé, l’autre portant l’argent. Celui-ci, glorieux d’une charge si belle, n’eût voulu pour beaucoup en être soulagé. Il marchait d’un pas relevé et faisait sonner sa sonnette ; quand l’ennemi se présenta, comme il en voulait à l’argent, se jeta sur le mulet du fisc, le saisit et l’arrêta. Le mulet, en se défendant, se sent percé de coups, gémit, soupire. Est-ce donc là, ce qu’on m’avait promis ? Ami, lui dit son camarade, il, n’est pas toujours bon d’avoir un haut emploi ; si tu n’avais servi qu’un meunier comme moi, tu ne serais pas si malade.
Publié le Jeudi, 04 Septembre 2008