NGUELMENDOUKA
Le commun des camerounais a beau n’avoir jamais entendu parler de cet arrondissement situé quelque part dans le Haut-Nyong. D’autres, quand ils connaissent, ne maitrisent pas l’orhtographe. Nguelmendoula, entendra-t-on parfois. Pourtant, le voyage vaut la peine. Peu importe la poussière, Nguelmedouka n’est pas un bled horrible, avec une ou deux maisons tout au plus, tel qu’on l’aurait imaginé. Cependant, ils sont loin, les beaux jours du café conquérant, rythmant le vécu quotidien.
Y aller
Minboman terminus à la gare routière Yaoundé Est
Coût du transport : 3500 FCFA
Moyen de transport : cars et minibus
Etat de la route : Bitumée sur 123 km jusqu’à Ayos
Distance : 212 km
Durée du trajet : 5 heures
Structures d’hébergement : une auberge

Repères
Création de l’arrondissement : loi 59-51 du 06 juillet 1959
Création présidentiel du 05 octobre 1992
Superficie : 2500km²
Population : 35 000 habitants (recensement 1987)
Principaux groupes ethniques : Maka Ebessep, Ayong Yerap, Omvang Sekonda, Omvang Ngomeya.
Le chiffre 65
Le nombre de villages que compte l’arrondissement
Avant tout, il y a une chose très importante à savoir sur Nguelmendouka. Pour le commun de ceux qui connaissent le coin, de ceux qui y vivent, de ceux qui y sont nés, c’est N’ka ou Nka. Qui l’a décidé ainsi, on ne le sait pas, et de toutes les manières ,on ne le sait pas, et de toutes les manières, on s’en fout. Pas qu’on n’ait aucun respect pour ce grand guerrier Omvang, fils du roi Nguelé Selek et de dame Mendouka, l’une des nombreuses épouses du souverain . et dans la cour du chef, chaque enfant était identifié à partir du nom de sa mère. Nguelé de Mendouka deviendra donc Nguelmendouka. Mais aujourd’hui, on prefère N’ka. Trois lettres au lieu de quatorze, une syllabe au lieu de cinq, moins de souffle depensé. N’ka c’est ainsi à partir de la gare routière.
Parlant justement de celle-là, la gare routière. La première erreur à ne pas commettre, c’est d’y arriver tôt le matin. Parce que ic’est à partir de midi que le car se met en branle. On a ainsi le temps de voir et de revoir le défilé de vndeurs en tous genres. Les plus itelligents déposent leurs effets et vont faire leurs derniers achats. Bref, le temps s’arrête. L’impatience n’a plus qu’à se suicider. La hâte n’y a pas sa place. Et ce sera le cas tout au long du trajet. Où on s’arrêtera de temps en temps, qui pour se dégourdir les jambes, qui pour se payer du poisson fumé, un autre pour se soulager.
Mais, malgré ces arrêts intempestifs, aller à N’ka n’est pas un tableau peint en noir. Tout n’est que poussière et contrairement à l’idée reçue de bloquer toutes les issues, on demande aux passagers d’ouvrir les vitres. Explication, quand la poussière entre et que tout est ouvert, elle ressort de l’autre côté. Ce qui n’empêchera personne d’arriver tout rouge à destination. Autre hic, les ponts en bois qui donnent l’impression de céder à chaque passage de véhicule. Et le plus dur, ces marécages des deux côtés de la route. L’eau noire et affreusement tranquille du Nyong. Qui rythme presque tout le voyage. Normal, le fleuve est sur les terres qui l’ont vu naître, c’est le Haut-Nyong.
Du café séché sur presque toutes les cours. Le moderne courtoise les maisons en terre battue. Un carrefour Roger Milla. Un district nommé Mboma.
L’on arrive dans une unité administrative comme de nombreuses autres dans le pays. On attend tout le l’état. L’eau oublie régulièrement d’être potable. Les infrastructures, dans bien des secteurs, santé, éducation…, ne se diront pas appropriées.
Mais la vie poursuit tout de même son cours à Nguelmendouka, pardon N’ka. Le nuit, on dort au rythme du passage des grumiers qui font tremper terre, murs parfois même lits.
Les autochtones cohabitent paisiblement avec les allogènes venants pour la plupart du grand ouest (Bamiléké, bamoun, ressortissants du nord-ouest) et du grand nord. L’on trouve aussi des Nigériens et des Maliens. Ce voisinage heureux ne l’a pas toujours été. Les autorités assurent qu’il n’était en effet pas, facile pour un étranger de vivre à N’ka. L’expression la plus répandue était « ye wa nka », ici à Nguelmendouka » ou « vous n’êtes pas ici chez vous ». Mais les choses changent positivement. Et un jour, il en sera peut-être ainsi du développement de Nguelmendouka.
Le café à Nguelemendouka, l’histoire a débuté il y a des lustres. Si le prologue s’est écrit d’abord avec le café Arabica, et même avec une espèce qu’on a appelée Yokadouma, aujourd’hui, le Robusta règne en maître. Au départ, la culture du café était artisanale. N semait au petit bonheur, les dosages et autres, cela se faisait d’instinct.
Et puis la Zapi est arrivée, déroulez Zone d’action prioritaire intégrée. Elle est venue véritablement vulgariser la culture du café. La société couvrait toute la province de l’Est. Son siège, à Nguelemendouka. C’est dire toute l’importance que Nka avait fut même considérée, entre les années 80, comme le verger le plus important de tout l’Est. La Zapi donc, quand elle s’est installée dans les années 70, a tuyauté les planteurs sur la façon de créer des plantations, en respectant certaines normes techniques. Ainsi, la bienveillante Zapi donnait des sachets et des boutures pour les espèces à haut rendement.
Le café aura été le porte-bonheur de Nguelemendouka. Par ce que l’importance de la Zapi ne s’est sûrement pas arrêtée dans les plantations. L’entretien fonctionnait comme un «établissement de crédit. Elle accordait des prêts aux planteurs, qui pour construire sa maison, tel autre pour scolariser ses enfants. D’aucuns s’accordent même à dire que toute la grande élite de Nka a trouvé son compte dans la scolarité grâce à la Zapi. La Zapi récupérait son argent pendant les campagnes caféières. Un idylle qui aurait pu durer encore plus longtemps, si les coûts du café n’avaient pas connu une certaine dégringolade. Alors, les gens ont abandonné les plantations. Vers 1996, la Zapi est partie, ne laissant derrière elle que ses hangars de stockages, et le souvenir de tout ce dont les planteurs et leurs enfants avaient bénéficié jusque là.

Mais depuis quelques temps, les coûts ont tendance à remonter, les gens ont repris le chemin de leurs plantations. Seul problème, comme se plaint un planteur, c’est qu’avec la libéralisation de secteur, il y a tellement d’intervenants qui ne respectent pas les lois établies pour la commercialisation du café. Ce qui fait que les planteurs ne rentrent pas vraiment dans leurs bénéfices. Du côté des autorités, on se plaint de ce même problème. En effet, des particuliers n’hésitent pas à s’enfoncer dan,s la brousse, juché sur des motos. Ils se rendent dans les villages acheter directement des sacs de café aux producteurs, des acquisitions qu’ils vont transformer à Ayos. Ce qui rend impossible toute évaluation d’un tonnage à Nka.

Dans le cadre donc des établissements, l’arrondissement de Nguelemendouka compte 36 écoles primaires publiques et une école privée catholique, quatre école maternelles publiques et une école maternelle privée. De tous, il n’y a que le privé qui est bien loti. Mais pour le public, hormis le groupe I et le groupe II ici au centre, et quatre autres localités, le reste, ce sont des établissements qui ne sont pas encore construits. Surtout le secteur Ebessep qui a quelque chose comme seize écoles sur les trente-six. Je pense qu’il n’ y a que trois villages qui ont bénéficiés des constructions, entre autres de Plan Cameroun dans l’un d’eux. Le reste, ce sont des hangars. Il y a aussi le manque de tables-bancs. Le cas le plus criard, c’est l’école publique de Mbang où les enfants sont assis sur des bambous sur-montes par des piquets fourchus.
RADIO N’KA EST DANS LES COEURS
DES HABITANTS DE NGUELEMENDOUKA
Hormis le café, une autre oeuvre fait partie du patrimoine local, Radio N’Ka. 99.9 Fm. La Rfi des populations de Nguelemendouka-Ka. La Radio communautaire de la ville. Créée en 2001. Avec l’appui d’un comité de développement, l’Assodegnka, l’association pour le développement du grand N’Ka. Une Radio captée dans tout l’arrondissement. Auparavant, les ondes de Radio N’Ka s’étendaient même carrément au delà du département du Haut-Nyong. Les arrivent à survoler une parie de la province du Centre, Notamment Minta et Ayos. Maintenant, ce n’est plus pareil. En tout cas, plus depuis le sinistre qui a obligé la chaîne à changer de locaux.
Malgré ce petit malheur, Radio N’Ka reste dans les coeurs des habitants de Nguelemendouka. Ainsi que dans leurs oreilles. Du moins autant que le permettent les coupures d’électricité. Mais, y a pas un groupe électrogène ? bien sûr que si. Mais les cinq volontaires, chef de chaîne et animateurs, qui constituent le personnel, n’ont absolument pas les moyens de l’alimenter. Seulement, s’il y a un communiqué que le sous-préfet par exemple tient à diffuser, au sujet d’une réunion avec les populations, c’est toujours un exemple, le groupe pourrait être mis en marche.
En temps normal, donc de courant électrique, à Radio N’Ka, la journée continue, on ne connaît pas. Il faut dire que les volontaires de la chaîne vont occuper leurs fonctions respectives dans la journée. Ainsi, 99.9 Fm ouvre ses antennes à cinq heures et demie et les refermes à dix heures. La station reprend du service à seize heures pou arrêter à vingt-deux heures. Les émissions, diffusées en français et en langues locales, MAKA, OMVANG, sont pour l’essentiel des microprogrammes. A côté, la radio remplace bien le tam-tam avec la lecture des communiqués.
Pour en revenir aux microprogrammes, ils portent beaucoup sur la santé. D’ailleurs, Radio N’Ka a bénéficié de l’appui constitutionnel de l’Unesco dont le partenaire est axé le plus souvent sur l’éducation à la santé. Les animateurs se rendent donc à l’hôpital, rencontrent les spécialistes qui donnent les explications sur les maladies qui sévissent le plus dans la localité. Ces spécialistes sont souvent invités à l’antenne. Et dans sa logique de proximité, Radio N’Ka organise ensuite des débats pour savoir si les populations ont véritablement compris le sujet. De plus, la station est gérée comme une société à part entière, avec un comité de gestion qui tient lieu de relais entre la Radio, les populations et les conseils d’administration dirigé par le président de l’association Assodegnka.
Et si vous tenez à savoir pourquoi les populations de N’Ka, elles tiennent autant à leur Radio, c’est qu’elle relaie les informations du Poste national. Oui, Nguelemendouka toute seule n’y arriverait pas. La localité est dans une zone de silence. Il y a d’abord le problème de désenclavement, la route devrait être bien arrangée. Nous sommes dans une zone très agricole. Les produits seraient bien évacués et les paysans trouveraient leur compte, en même temps que le milieu ouvrier, les fonctionnaires et autres, même l’évacuation des malades serait facilitée.
Nous prenons l’exemple de notre groupement Ebessep. D’abord, tout le groupement est enclavé. Ce qui décourage les habitants de ce côté. Ils ont beau produire, mais ils n’ont pas les moyens d’évacuer cette production. La base de tout développement, c’est l’éducation. Dans le groupement Ebessep, nous avons douze écoles à cycle complet. Mais vous trouverez que c’est un moniteur qui est seul maître qu’on affecte dans une école. Quel rendement pet-on tirer de ce genre d’école, où à peine on réussit à avoir quelques certifiés qui n’ont pas le niveau des autres des autres. Nous avons que nos yeux pour pleurer. S’il y avait au moins l’électricité et la route dans ces villages, les gens allaient se débrouiller pour se développer eux-mêmes. Même ici en ville, je suis seulement à deux kilomètres du centre, je n’ai pas d’électricité.

Nguelemendouka pour les uns, N’Ka pour les autres. Deux dénominations pour désigner un même lieu, ce n’est pas être courant sous nos latitudes. Et pourtant, les natifs de cet arrondissement du Haut-Nyong ont depuis ont depuis longtemps appris à jouer sur les deux cordes de l’arc. Les habitants de la très officielle localité de Nguelemendouka auraient-elles donc décidé de faire plus simple en réduisant le nom kilométrique de leur cité en trois lettres ?
On serait tenté de le croire. Il faut dire que l’appellation complète semble rebutante de prime abord pour un non habitué. D’où des multiples erreurs de prononciation, voire d’orthographes qui ne manquent pas heurter la sensibilité des puristes.
Mais au fait, où se trouve ce sacré bled aux noms si particulier. Aller sur place n’est déjà pas une partie de plaisir. Par simple déjà de dénicher la gare routière et encore moins de connaître l’heure de départ du car. Pas si évident que ça ! Autant s’armer de patienceTous ceux qui ont eu à braver l’itinéraire sont unanimes sur un point : l’enclavement constitue le principal obstacle au développement du coin. Au départ de Yaoundé, il faut adieu au goudron après Ayos et bonjour la poussière qui noie littéralement les passagers d’un épais manteau rougeâtre. Autant prendre ses précautions dès le départ en se couvrant de la tête aux pieds. Et pourtant, quelle agréable aventure, malgré tout. Il est en effet difficile de dissimuler son émerveillement en parcourant cette contrée luxuriante, presque vierge, parsemée de marécages et de cours d’eau. Mais au bout de l’aventure, la déception n’est pas lion.
A peine débarqué, le visiteur est confronté aux sempiternelles difficultés de communication. Inutile de préciser que le mauvais état des routes (non goudronnées) entrave les déplacements dans la cité mais aussi vers les localités environnantes. On l’a toujours dit : la route et le développement sont intimement liés. Il va de soi que pour évacuer la production agricole ou transporter des malades vers un centre de santé, les voies de communications sont indispensables.
La cité elle-même ne paie pas de mine, malgré son statut de chef-lieu d’arrondissement. Au niveau de l’habitat, rien ou presque n’a pratiquement changé de depuis des décennies. Inutile de chercher sur place une réalisation immobilière d’envergue.
Si la voirie urbaine a fait des timides progrès ces dernières années, les populations locales sont confrontées à des pénuries persistantes. On ne compte plus les coupures d’électricité qui s’étendraient parfois sur plusieurs mois. Pas de quoi attirer des entreprises gourmandes en énergie. L’eau potable figure également parmi les besoins prioritaires des populations sevrées de cette ressource indispensable depuis la fermeture des vieilles installations de la Scanwater. Suprême paradoxe : certains villages bénéficient des forages alors que le centre ville est dépourvu d’adduction d’eau. On n’expliquerait pas autrement la multiplication des maladies d’origine hydrique. Si le développement durable reste en vue de l’esprit, il n’en demeure pas moins vrai que certaines choses sont en train de changer. Certaines ONG s’impliquent progressivement dans les projets en vue d’améliorer les conditions de vie des populations. Mais une localité ne saurait vivre uniquement de l’assistance extérieure. Les élites, très divisées semble-t-il, devraient jeter aux orties leur ego et mobiliser toutes les forces vives pour tirer leur terroir vers le haut.