Ordonnance n°73-27 du 30 août 1973

Relative à l’exercice de l’activité bancaire

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,

Vu la constitution de la république unie du Cameroun ;

Vu l’article 13 de la loi n° 73-2 du 29 juin 1973 portant loi de fiances pour l’ exercice 1973-1974,

Ordonne :

Chapitre Premier

Champ d’application

Article premier.- Les dispositions de la présente ordonnance s’applique :

a) Sans restriction :

1. Aux banques et sociétés financières à caractère bancaire, industriel commercial ou autre qui font appel au public pour obtenir des dépôts a vue ou à terme sans limitation de durée, en vue d’ effectuer des opérations d’escompte, de placement, de crédit et autres opérations financières.
2. Aux organismes de prêts avec constitution à terme d’une épargne.

b) Selon les modalités déterminées par voie réglementaire :

1. A l’institut d’émission ;

2. A la caisse d’épargne postale.

Art.2.- Ne sont pas soumis aux dispositions de la présente ordonnance :

1° les organismes d’Etat chargés de prise de participation ou de crédit au développement ;
2° les établissements financières relevant d’une réglementation particulières.
3° les notaires, agents d’affaires et gérants de fortunes qui administrent les Fonds de leurs clients sans effectuer des opérations de placement ou de crédit.

Art.3.- Les établissements sont soumis à la présente ordonnance, exception faite de ceux visés à l’ alinéa Ier de l’article 2, ne peuvent faire figure le terme « banque » ou « banquier » dans leur raison sociale ou dans leur publicité.

Art.4.- La nature d’un établissement est fonction de ses activités autorisées par décision réglementaire de l’autorité monétaire assumée par le ministre des finances.

Chapitre II

Conditions d’exercice de l’activité bancaire.

Art.5.- Aucun banque, aucun établissement visé à l’article 1er ne peut exercer sur le territoire national sans y avoir été dument autorisé. L’inscription au registre de commerce est subordonnée à cette autorisation, ainsi que l’immatriculation spéciale auprès du Conseil national crédit.

Art.6.- L’autorisation pour l’exercice de l’activité bancaire est subordonnée aux conditions ci-après :

1. Forme sociétaire :

L’organisation qui sollicite l’agrément doit avoir obligatoirement l’une des formes sociétales suivantes :

– Société anonyme ;

– Société en commandite par action.

2. Capital
Le Capital minimum exigé doit être entièrement libéré. Sauf dérogation accordée par l’autorisation monétaire, la participation des intérêts publics ne peut être inférieure au tiers du capital social.

L’Etat jouit d’un droit de préemption sur les actions à céder.
3. Documents à produire :

La société est tenue de déposer au ministère des finances :
– Ses statuts et la liste des actionnaires ;

– Son règlement intérieur et son organisation de gestion et de contrôle interne ;


– Les contrats ou conventions qui la tient avec d’autres sociétés nationales ou étrangères.

4. Obligation des personnes physiques :

a) Sous réserve des dispositions transitoires prévues à l’article 26, les personnes physiques chargées de la direction de la banque doivent être de nationalité camerounaise et résider au Cameroun.

b) Nul ne peut exercer l’activité bancaire :

– S’il a été condamné pour un crime de droit commun, d’atteinte à la sécurité ou au crédit de l’ Etat, de tentative ou complicité de ces infractions ;

– S’il a été condamné pour vol, abus de confiance, escroquerie, infraction à la réglementation de change et des transferts ;

– S’il a été déclaré en faillite, sauf réhabilitation intervenue en sa faveur ;

– S’il a été condamné en tant que gérant ou dirigeant d’une société en vertu de la législation sur la faillite ou la banque route, sauf réhabilitation intervenue en sa faveur ;

– S’il n’a pas été agréé par l’autorité monétaire.

Art.7. – Les banques de droit camerounais, mais sous contrôle étranger ne peuvent exercer au Cameroun que si les conditions additionnelles ci-après sont remplies :

1. L’établissement doit obligatoirement conserver sa raison sociale d’origine.
2. La banque est tenue de donner tous les renseignements à l’autorisation monétaire sur les opérations courantes avec la maison- mère et avec l’étranger.

3. Toute modification dans la répartition du capital est soumise à l’autorisation préalable de l’autorisation monétaire.

Les dispositions du présent article s’appliquent aux banques dans lesquelles la participation étrangère directe ou indirecte représente plus de la moitié du capital social.

Chapitre III

Art.8.- Selon les règles générales applicables en la matière, les banques sont tenues de maintenir un rapport approprié entre :

1. Le montant de leurs fonds propres et celui de l’ensemble de leurs engagements ;

2. Leurs disponibilités et leurs actifs réalisables à court terme d’une part et leurs engagements exigibles à court terme, d’autres part.

Art.9.-1. A l’effet de contribuer au développement national, toutes les banques peuvent prendre des participations dans les conditions et limites autorisées.

2.Les prêts et avances qu’une banque peut accorder à un client ou à un groupe d’entreprise animé par le même client, de même que les participations qu’une banque est autorisée à prendre dans une entreprise ou dans des entreprises relevant d’un même contrôle, doivent être en rapport avec ses fonds propres, et ne pas excéder une proportion déterminée par voie réglementaire.
3. Les banques et établissements financiers ne peuvent intervenir sous quelque forme que ce soit en faveur des personnes physiques ou morales qui entretiennent des disponibilités injustifiées hors de la République unie du Cameroun.

Art.10.- En vue d’entreprendre des actions communes aux banques en faveur des petites et moyennes entreprises notamment en matière de formation, d’information, de conseil et de tenue de comptabilité, il est ouvert un compte spécial auprès de la banque camerounaise de développement. Accessoirement, ce compte participe à la garantie de bonne fin des crédits à la production accordés aux petites et moyennes entreprises selon les modalités fixées par vois réglementaire.

Ce compte est alimenté par :

– Des dotations du budget de l’Etat ;

– Des prélèvements sur les produits des banques au prorata du volume de leurs interventions. Le taux de prélèvement est fixé annuellement par la loi de finances.

Art.11.-1. Les banques et les sociétés visées par la présente ordonnance doivent tenir leur comptabilité au Cameroun.

2. Les banques établissent des comptes annuels comprenant un bilan et un compte de pertes et profits.

3. le bilan est dressé conformément aux normes en vigueur en république unie du Cameroun.

4. Les banques établissent également des situations mensuelles.

Art.12.- Est soumise à l’ accord préalable de l’autorité monétaire toute entent ou convention entre les banques opérant en république unie du Cameroun.

Art.13.- Est interdite toute entente interbancaire de caractère discriminatoire dans la distribution et les conditions de crédit sauf disposition générale arrêtée par le gouvernement.

Art.14.- Les banques sont tenues de respecter :

1. Les règles générales édictées en matière de crédit ;

2. Les règles particulières applicables à la rémunération de l’épargne ;

3. Les règles particulières relatives à la formation des intérêts débiteurs aux commissions de compte, de transfert…

Chapitre IV

Contrôle

Art.15.- Le Conseil national du crédit est un organisme consultatif chargé d’émettre des avis sur l’orientation de la politique du crédit d’émettre des avis sur l’ orientation de la politique du crédit. Il fait assurer le contrôle de l’activité bancaire.

Le Conseil national du crédit est placé sous l’autorité du ministre des finances.

Art.16. – Le Conseil national du crédit reçoit de toutes les banques et de tous les établissements financiers suivant une périodicité déterminée par l’autorité monétaire des renseignements relatifs à leurs activités et notamment à leurs ressources et à leurs emplois.

Art.17.- Le Conseil national du crédit , à l’ effet d’assurer le contrôle permanent de l’ activité bancaire désigne une commission de contrôle des banques et des établissements financiers.

Art.18.- La composition, l’organisation et le fonctionnement du Conseil national du crédit et de la commission de contrôle des banques et des établissements financiers sont fixés par décret.

Art.19.- L’association professionnelle des banques est un organisme consultative qui participe au Conseil national du crédit et de la gestion du Fonds spécial visé à l’ article 10.

L’association professionnelle des banques est placée sous la tutelle de l’autorisation monétaire.

Art.20. – est obligatoire l’adhésion à l’association professionnelle des banques à l’exclusion de tout autre groupement, des sociétés régies par la présente ordonnance.

Art.21.- obligation est faite aux banques de disposer d’un corps d’inspection interne permanent, indépendant des structures de gestion.

Le corps d’inspection dresse un rapport annuel soumis à la direction de la banque qui en assure la transmission au ministre des finances.

CHAPITRE V

Dispositions pénales

Art.22.- Toute personne qui aura

– Exercé l’activité bancaire en République unie du Cameroun pour le compte ou pour le compte d’un tiers sans avoir reçu l’autorisation ou l’agrément requis;

– Utilisé dans sa raison sociale ou dans sa publicité les termes « banquier » et autres en violation des dispositions de la présente ordonnance ;

– Conclu des engagements en contravention des dispositions des articles 9,12,13 et 14 ci-dessus ;

– Donné de faux renseignements;

– D’ une manière générale, violé les dispositions de la présente ordonnance notamment celles relatives aux règles de gestion ;

a) Est puni d’emprisonnement égal à 6 mois au mois et à 5 ans au plus ;
b) Est passible d’une amende comprise entre 500.000 francs et 50.000.000 de francs ;

Ou de l’une de ces peines.

Art.23.- Les dispositions générales du code pénal sont applicables dans la mesure où la présente ordonnance n’en dispose pas autrement.

Art.24.- Quiconque dans l’ exercice des ses fonctions de gestion ou de contrôle relève un secret à lui confié ou dont il a normalement connaissance en raison de sa charge, est passible des peines prévues à l’ article 310 du code pénal.

Toutefois, cette interdiction ne s’applique pas aux renseignements exigés par l’ autorité monétaire ou judiciaires.

Chapitre VI

Dispositions transitoires et finales

Art.26.- Par dérogation aux dispositions de l’ article 6 paragraphe 4 alinéa a) ci-dessus, les banques existant à la a date de signature de la présente ordonnance peuvent être dirigées par des non nationaux pour une période de deux ans exceptionnellement renouvelable une fois à la condition expresse que les intéressés résident au Cameroun.

Art.27.- Les conditions exigés par les dispositions des article 4,5,6,12,14 de la présente ordonnance doivent être remplies par les sociétés opérant actuellement au Cameroun au plus tard le 1er janvier 1974.

L’autorité monétaire, passé ce délai, peut délivrer exceptionnellement une autorisation spéciale d’exercer dont la validité ne peut excéder six mois pour un même établissement.

Art.28.- Des décrets fixeront en tant que de besoin les modalités d’application de la présente ordonnance.

Art.29.- Sont abrogés à l’ entrée en vigueur de la présente ordonnance les dispositions du décret n°62-DF-90 du 24 mars 1962 et des textes subséquents portant réglementation de la profession bancaire au Cameroun et créant les organisme destinés à assurer l’étude et de la mise en œuvre de la politique du crédit ainsi que le contrôle de la profession bancaire.

Art.30.- La présente ordonnance , publiée selon la procédure d’urgence sera exécutée comme loi de la République unie du Cameroun et publiée en français et en anglais au journal officiel.

Yaoundé, le 30 août 1973.

EL HADJ AHMADOU AHIDJO.