Passation et contrôle de l’exécution des marchés publics

Circulaire n°00/CAB/PR/ du 19 juin 2012

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

A

• Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement ;

• Monsieur le Vice-premier ministre ;

• Messieurs les ministres d’Etat ;

• Mesdames et messieurs les ministres ;

– Les ministres délégués ;

– Les secrétaires d’Etat ;

– Les chefs de missions diplomatiques.

La présente circulaire a pour objet de préciser les modalités de passation et de contrôle de l’exécution des marchés publics.
Elle s’inscrit dans la reforme en profondeur du cadre juridique et institutionnel des marchés publics, qui a été initiée avec la publication des décrets nos :

– 2011/408 du 09 décembre 2011 portant organisation du gouvernement ;

– 2012/074 du 08 mars 2012 portant création, organisation et fonctionnement des Commissions de passation des Marchés publics ;

– 2012/075 du 08 mars 2012 organisation du ministère des Marchés publics ;

– 2012/075 du 08 mars 2012 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n°2001/048 du 23 février 2001 portant création, organisation et fonctionnement de l’Agence de Régulation des Marchés publics (ARMP).

1. De manière générale, la reforme en cours a pour but d’améliorer la gouvernance et l’intégrité du système de passation, d’exécution et de contrôle des marchés publics en vue d’assurer la qualité de la dépense publique et de l’effectivité de la réalisation des projets arrêtés.

2. De manière spécifique, la reforme vise à accroître la transparence dans ce secteur, à réduire les délais de passation des marchés publics, à rendre les contrôles plus efficaces et à assurer la qualité des ouvrages réalisés par l’Etat et ses démembrements.

3. Sur le plan pratique, la mise en œuvre de la reforme se traduit par :

– La définition adéquate des autorités et responsables désormais habilités à lancer les appels d’offres et à signer les marchés publics ;

– La création de nouvelles commissions de passation des marchés à différents niveaux administratifs ;

– Le relèvement du plafond des lettres-commandes ;

– La revue des délais de passation des marchés ;

– La précision du rôle de l’Observateur Indépendant.

I – DES ORGANES DE PASSATION DES MARCHES PUBLICS

4. Comme par le passé, la passation des marchés publics va continuer à se faire avec la participation des administrations et structures bénéficiaires, conformément aux dispositions de la règlementation en vigueur.

5. Dans ce cadre, les autorités et responsables ci-après sont autorisés à lancer les appels d’affres et à signer les marchés publics : le ministre délégué à la présidence de la République chargé des marchés publics, les chefs des départements ministériels et autres administrations publiques, les Directeurs Généraux et les Directeurs des Etablissements Publics et Entreprises du secteur public et parapublic, les Délégués régionaux des marchés publics, les chefs des Exécutifs des collectivités territoriales Décentralisées, ainsi que les chefs des projets.

6. A cet effet, il convient de rappeler que :

• Le ministre délégué à la présidence de la République chargé des Marchés publics passe les marchés relevant des seuils de compétence des Commissions Centrales de Passation des marchés publics, ainsi que les marchés des services centraux des départements ministériels dont le montant est moins égal à 50 millions de francs CFA ;

• Les chefs des départements ministériels et autres administrations publiques passent les marchés au moins égaux à 5 millions et inférieurs à 50 millions de francs CFA, avec l’appui des commissions ministérielles de passation des marchés publics ;

• Les délégués régionaux des Marchés publics passent les marchés relevant des seuils de compétence des Commissions Régionales de Passation des marchés publics, les marchés des crédits délégués aux services déconcentrés régionaux des administrations publiques dont les montants sont au moins égaux à 5 millions et inférieurs à 50 millions de francs CFA, de même que les marchés des Etablissements Publics et Entreprise du secteur public et parapublic installés dans la région au sein desquels il n’est pas créé de Commission Interne, dont les montants sont au moins égaux à 5 millions de francs CFA, et inférieurs aux plafonds reconnus aux Commissions Régionales de Passation des Marchés.

• Les délégués départementaux des Marchés publics passent les marchés des crédits délégués aux services déconcentrés départementaux et d’arrondissement des Administrations Publiques, dont les montants sont moins égaux à 5 millions de francs CFA et inférieurs à 50 millions de francs CFA, à l’exception des marchés de services et prestations intellectuelles dont les plafonds sont de 15 millions de francs CFA. Ils signent également les lettres-commandes des collectivités territoriales décentralisées du département au sein desquelles il n’est pas créé de Commission Interne.

• Les directeurs généraux et les Directeurs des établissements publics et entreprises du publics et entreprises du secteur public et parapublic, les chefs des exécutifs des collectivités territoriales décentralisées ainsi que les chefs des projets au sein desquels, il existe des Commissions internes passent les marchés dont les montants sont :

– Au moins égaux à 50 millions et inférieurs à 500 millions de francs CFA pour les marchés de routes et autres infrastructures ;

– Au moins égaux à 50 millions et inférieurs à 200 millions de francs CFA pour les marchés des bâtiments et équipements collectifs ;

– Au moins égaux à 50 millions et inférieurs à 100 millions de francs CFA pour les marchés des approvisionnements généraux ;

– Au moins égaux à 15 millions et inférieurs à 50 millions de francs CFA pour les marchés des services et prestations intellectuelles.

7. Les commissions de passation des marchés publics doivent continuer à jouer leur rôle d’appui technique aux autorités et responsables habilités à signer les marchés publics.

• Les commissions centrales de passation des marchés sont placées auprès du ministre délégué à la Présidence de la République chargé des Marchés Publics.

• Les commissions ministérielles de passation des marchés sont placées auprès des Ministres.

• Les commissions locales, à savoir, les Commissions régionales de passation des marchés et les commissions départementales de passation des marchés, sont respectivement placées auprès des délégués régionaux et des délégués départementaux des Marchés publics ;

• Les commissions internes de passation des marchés, sont placées auprès des chefs de certains établissements publics et entreprises du secteur public et parapublic et des chefs de certaines collectivités territoriales décentralisées ;

• Les commissions spéciales de passation des Marchés sont créées auprès des chefs de certains projets par le ministre des Marchés publics.

8. La mise en place desdites commissions a pour objectif de contribuer au respect de la réglementation, du libre accès à la commande publique, de l’égalité de traitement des candidats et de la transparence dans les procédures des marchés publics.

9. Le ministère en charge des marchés publics qui est chargé de constater la composition des Commissions, doit veiller à la tenue régulière des sessions.

10. Par ailleurs, il prend en charge le fonctionnement des Commissions de passation des marchés à l’exception des Commissions internes pour lesquels chaque administration concernée doit prévoir les ressources nécessaires au fonctionnement de sa commission et accréditer le président comme ordonnateur délégué de la ligne budgétaire y afférente.

11. Toutefois, pour l’année 2012, les dépenses des commissions ministérielles des marchés sont supportées exceptionnellement par les dotations des budgets des administrations concernées.

II – DE LA PASSATION DES MARCHES PUBLICS.

12. La passation des marchés publics s’effectue conformément aux dispositions de la réglementation en vigueur.

13. La réduction significative des délais de passation des marchés publics est un objectif qui doit être recherché par l’ensemble des organes impliqués. A cet effet, il convient de rappeler :

– La Commission de passation des Marchés publics dispose d’un délai maximal de 21 jours, à compter de la date d’ouverture des offres, pour formuler sa proposition d’attribution, y compris des délais accordés à la sous-commission pour l’analyse des offres ;

– Le délai d’analyse des offres techniques et financières est fixé à 7 jours maximum lorsque l’ouverture des offres s’effectue en un temps, et à 10 jours lorsque cette ouverture intervient en 2 temps, quels que soient l’importance ou la nature du projet objet de la consultation, l’allotissement mis en concurrence ou le nombre des offres reçues ;

– Dans le cas d’une procédure d’urgence, le délai est ramène à 5 jours.

14. La passation des marchés publics doit également respecter le principe de non fractionnement. Lorsque les prestations répondant à un même appel d’offres portent sur les prestations de même nature ou lorsqu’ils sont imputables sur la même ligne budgétaire, le montant total prévisionnel de l’ensemble des marchés à passer, doit être pris en compte pour déterminer le seuil de compétence de la Commission.

15. Le relèvement du plafond des lettres-commandes à 50 millions de francs CFA a pour objectif, d’une part, d’éviter un engorgement du ministère en charge des Marchés publics, susceptible de constituer une source de lenteur et d’inefficacité dans la mise en œuvre des projets retenus ; et, d’autre part, d’éviter le blocage des activités quotidiennes ou courantes des départements ministériels, pour lesquelles les Ministres devraient pouvoir recourir, soit aux bons de commande, soit aux lettres-commandes.

16. Pour satisfaire la double exigence de réduction des délais et d’efficacité, les présidents des commissions de passation des marchés publics doivent faire preuve de rigueur et de sens d’organisation du travail. Ils peuvent, si nécessaire, créer plusieurs sous-commissions d’analyse, pour évaluer les offres reçues d’un même appel d’offres.

17. Les marchés dont le financement est assuré par les bailleurs de fonds extérieurs obéissent à des procédures convenues d’accord parties. A cet effet, les délais doivent prendre en compte les contraintes liées à l’obtention de la non objection de ceux-ci.

18. La procédure de gré à gré doit demeurer exceptionnelle. Elle n’est possible que dans l’un des cas limitatifs prescrits par le Code des Marchés publics. C’est dans ce cadre exclusif que le ministre des Marchés publics peut procéder à la passation d’un marché de gré à gré, notamment pour ceux relevant de la compétence des Commissions centrales.

19. Pour les marchés relevant des Commissions ministérielles, locales, internes ou spéciales, le chef de la structure concernée sollicite l’autorisation préalable de gré à gré du ministre chargé des Marchés publics.

20. Pour être recevable, la demande d’autorisation de gré à gré doit correspondre, quant à sa motivation, à l’un des cas limitatifs prévus par le Code des Marchés publics.

21. Dans tous les cas, après l’obtention de l’accord de gré à gré, le dossier doit toujours être soumis à la Commission de passation des Marchés publics compétente pour examen. Celle-ci dispose d’un délai de 07 jours pour émettre son avis.

22. En tout étant de cause, les délais suivants sont de rigueur pour les marchés passés selon la procédure de gré à gré :

– 15 jours pour notifier le marché à son attributaire lorsque celui-ci est connu ;

– 30 jours dans le cas où il faut consulter trois entreprises. Passé ces délais, le ministre en charge des marchés publics est habilité à procéder à leur annulation pure et simple.

23. Les désaccords éventuels susceptibles de survenir entre une Commission de passation des Marchés publics et une autorité contractante font l’objet, si nécessaire, d’arbitrages appropriés à chaque étape de la procédure.

24. En cas de désaccord entre une Commission de passation des Marchés publics et une autorité contractante, l’autorité contractante doit, dans les trois (03) jours à compter de la date de réception de la proposition de la commission demander au président de la commission un deuxième examen du dossier, en mentionnant expressément ses réserves.

25. Le président fait réexaminer le dossier par la commission concernée, et notifie la deuxième position à l’autorité contractante. Si le désaccord persiste :

– En phase d’adoption du dossier d’appels d’offres ou d’examen du projet de marché ou d’avenant, le ministre des Marchés publics ou le chef de la structure concernée engage sa responsabilité, lance l’appel d’offres ou signe le marché ou l’avenant. La Commission en prend acte et mentionne ses réserves dans le procès-verbal de séance.

– En phase d’attribution, le ministre en charge des marchés publics attribue le marché si celui-ci relève d’une Commission centrale.

– Si le marché relève d’une Commission ministérielle, locale, interne ou spéciale, la procédure est suspendue et le dossier transmis au ministre en charge des marchés publics, à la diligence de l’autorité contractante, pour arbitrage.

26. En cas de désaccord entre l’autorité contractante et la Commission de passation des Marchés publics concernée, les délais continuent à courir.

27. En ce qui concerne les recours, tout soumissionnaire qui s’estime lésé dans une étape de la procédure, peut introduire une requête auprès du ministre en charge des Marchés publics, avec copie à l’Agence de régulation des Marchés publics, et au chef de la structure auprès de laquelle est placée la commission.

28. Sous peine de forclusion, toute requête doit être formulée dans les délais prévus par le Code des Marchés publics. Le ministre en charge des marchés publics instruit la requête et tranche dans les 15 jours.

29. Tout appel d’offres doit être lancé sur la base de la disponibilité des études de faisabilité et du financement. Les projets doivent faire l’objet d’une inscription dans le budget d’investissement public de l’exercice en cours et être en cohérence avec le document de Stratégie pour la croissance de l’Emploi et le cadre des dépenses à moyens terme.

30. La réalisation des études préalables, la pré-qualification en cas d’appel d’offres restreint, le choix de la procédure de passation, l’élaboration des dossiers d’appel d’offres (DAO), notamment la définition des termes de références et l’établissement des prescriptions et des spécifications techniques sont du ressort des administrations bénéficiaires des prestations. Toutefois, le ministère en charge des Marchés publics va s’employer à y apporter sa collaboration dans le cadre de ses prérogatives et, participer au montage financier, le cas échéant.

Concernant les projets de routes, de bâtiments, équipements collectifs et des autres infrastructures, les études géotechniques des avant – projets sont exigées.

31. Tout lancement d’appel d’offres relevant de la compétence des Commissions centrales et locales ne devrait intervenir qu’après accord entre le ministère des Marchés publics et les administrations bénéficiaires des prestations, sur la base des éléments techniques et financiers du dossier d’appel d’offres.

32. Concernant les missions diplomatiques, le lancement de l’appel d’offres est subordonné à l’accord préalable du Ministre en charge des marchés publics.

33. Le choix du cocontractant relève de la compétence du ministre chargé des marchés publics. Toutefois, un représentant de l’Administration bénéficiaire assiste en qualité de membre à chacune des étapes des travaux des Commissions centrales ou locales, pour le dossier qui le concerne, avec voix délibérative.

34. Les marchés spéciaux continueront de s’effectuer conformément à la règlementation en vigueur.

35. La réforme en cours maintient l’observateur indépendant comme acteur du système de passation des marchés, en vue de garantir la transparence et la saine concurrence.

36. L’observateur indépendant prend part à toutes les séances de la Commission de Passation des Marchés auprès de laquelle il est affecté. Il est convoqué dans les mêmes formes et délais que les membres des Commissions de passation des Marchés publics et de ceux de la sous-commission d’Analyse. Il assiste aux travaux des sous-commissions d’analyse pour tous les marchés d’un montant au moins égal à 50 millions de francs CFA.

37. Dans un souci de disponibilité et d’efficacité, un observateur indépendant ne peut couvrir les séances de plus de deux commissions.

III – DU CONTROLE ET DU SUIVI DES MARCHES PUBLICS

38. Le contrôle et le suivi de l’exécution des marchés publics doivent, plus que par le passé, faire l’objet de la plus grande attention de tous les acteurs, afin d’éviter les dérives observées, notamment le non achèvement de certains chantiers engagés, le dépassement du plafond toléré de 30% pour certains avenants, la modification de la consistance et des quantités contractuelles des travaux, les marchés exécutés au-delà des délais contractuels et le démarrage tardif des travaux sur le terrain.

39. Le ministère en charge des marchés publics doit assurer le contrôle de l’exécution des marchés publics, en liaison avec les administrations bénéficiaires.

40. Le ministère en charge des marchés publics est compétent pour le contrôle sur le terrain de l’exécution des marchés publics en cours de réalisation ou de démarrage qu’il s’agisse des approvisionnements, études, audits, maîtrises d’œuvres complètes ou partielles de routes, de bâtiments ou des équipements collectifs et autres projets structurants, tel que prévu par les dispositions sus-évoquées.

A cet effet, le Ministre en charge des Marchés Publics doit s’assurer de l’effectivité de la réalisation des travaux, de la pertinence des études et de la conformité des livraisons, de la commande publique.
Dans cette optique, la transmission par le Contractant des documents de payement des prestations, est subordonnées au visa préalable du Ministre en charge des marchés publics dans un délai de trois (03) jours.

41. Le ministère en charge des marchés publics procède, avec le concours de ses services compétents, à des contrôles inopinés des marchés en cours d’exécution, en vue notamment de s’assurer du respect des clauses du marchés et des règles de l’art. Lesdits services constatent les infractions et établissement les procès vernaux de constats, le cas échéant, en vue de les faire réparer ou sanctionner par les autorités compétentes.

42. Le ministère en charge des marchés publics effectue des contrôles a posteriori pour analyser le comportement d’un ouvrage ou d’une fourniture sous garantie.

Et tout état de cause, le ministère en charge des marchés publics définit les procédures de contrôle de l’exécution des marchés publics sur le terrain.

43. L’Agence de régulation des Marchés publics reste le surveillant et le facilitateur du système des marchés publics.

44. Afin d’assurer la continuité du service public, les Commissions actuelles de passation des Marchés publics continuent de siéger jusqu’à la mise en place des nouvelles Commissions par le Ministre en charge des marchés publics à qui, il est demandé la plus grande diligence.

45. Dès constitution de ces derniers, le maître d’ouvrage ou le maître d’ouvrage délégué transfère les dossiers en cours aux Commissions compétentes mises en place, pour suite de la procédure.
Telles sont les grandes orientations et les dispositions pratiques qui doivent guider la passation, l’exécution et le contrôle des marchés publics pour lesquels les autorités et les responsables habilités doivent collaborer étroitement afin d’imprimer au traitement des dossiers y relatifs toute la célérité nécessaire.

Je demande au Premier ministre, chef du gouvernement de tenir la main au respect scrupuleux des orientations contenues dans la présente circulaire et au ministre délégué à la présidence de la République chargé des Marchés publics, de veiller à leur stricte application.

Le président de la République,

(é) Paul BIYA.