MBANGA
Lapiro de Mbanga
Jamais sans ma ville
Située sur la Nationale n° 5 Douala-Bafoussam, Mbanga s’étend sur 33 villages et quartiers. C’est un arrondissement du département du Moungo, nanti cependant de tous les guide-emblème ne s’en satisfait pas : « Pour le rôle que Mbanga a joué dans l’histoire, elle mérite plus d’égards. Du teps des allemands, c’était une ville prospère, pôle administratif de toute la région qui s’étendait du Moungo au Nkam. Mais on a préféré ériger Yabassi en chef-lieu de département dans les récents découpages administratifs. Et pour Mbanga, rien Un jour, je porterai plainte à l’Etat du Cameroun pour avoir piétiné et martyrisé Mbanga.»
La ville a pourtant eu, en 1963, le privilège d’accueillir les présidents et vice-président du Cameroun. Ahmadou Ahidjo et John Ngu Foncha y sont venus inaugurer la célèbre ligne de chemin de fer Mbanga-Kumba. Un symbole, alors que le pays cherchait à conforter l’unité entre les parties anglophone et francophone. Grâce au rail, de nombreux compatriotes ont convergé vers les terres fertiles de Mbanga, à la recherche d’un mieux- vivre. D’importantes communautés bayangui, éton ou bafia ne connaissent plus d’autres horions
pris la couleur locale.
L’une des plus grades bananeraies du pays fait la fierté du coin. Elle emploie une importante main d’œuvre locale. Mais la Société des plantations de Mbanga (SPM) subit en ce moment les contrecoups de la crise mondiale du secteur, exacerbée p l’application des règles de libre-échange; imposées par I’OMC (Organisation mondiale du commerce). «La SPM est venu réduire le chômage et la délinquance. Il soutient de nombreuses familles ici, l’Etat ne doit pas laisser mourir cette unité agro- industrielle», estime Lapiro. Pour lui, faudrait apporter de petites subventions aux agriculteurs. A Mbanga, les gens ont fait des plantations de petite et moyenne échelles ((palmiers, ananas), mais sont découragés parce qu’abandonnés à eux-mêmes. Cependant la visite, en décembre dernier, du ministre du Travail et de la Sécurité sociale est venue apporter du baume au cœur : « Je vous assure, se réjouit le musicien, c’est la première fois qu’un membre du gouvernement venait à Mbanga comme l’a fait le ministre Robert Nkili. Il est allé dans les plantations, il a discuté avec les populations. Il s’est intéressé à la vie des gens d’ici ; ce que même l’élite locale ne fait pas. On ne la voit qu’en période électorale venir se jouer de la misère des gens, avec la viande et la bière pour corrompre les consciences.»
Mbanga ne s’est pas développée au fil des années. Lapiro dénonce les détournements de micro-crédits de développement par les élus locaux. Aucun projet n’a vu le jour au bénéfice des populations : «J’ai dû moi- même construire deux ponceaux au quartier 12, d’une valeur de 4 millions de francs payés de ma poche.» L’élite intellectuelle sortie du moule du mythique collège Saint Jean, elle non plus, n’est pas revenue sur ses pas. Crée en 1940 par les missionnaires catholiques, l’établissement poursuit son œuvre de formation à la suite des Joseph Charles Doumba, feu Réné Owona et autres, Augustin Kontchou Kouomegni. Mais il reste une dynamique impulsée par Lapiro, chef traditionnel
de 3e degré du quartier 12.
Enbonne intelligence avec les autorités administratives locales, il s’investit dans des initiatives diverses, Il a eu son bar dancing dont la légende ne n‘est pas encore complètement éteinte.
Mais surtout, ces dernières années, des campagnes d’hygiène et de salubrité, l’aménagement des ces de jeu et de loisirs, etc. Pour marquer son attachement à cette ville, l’artiste des gagne-petit, des laissés- pour-compte et des marginaux, a choisi, au début de sa carrière, d’adopter le nom de Mbanga. Lapiro a été formé à partir des deux premières lettres de son véritable nom Lambo Sandjo Pierre Roger. Le patronyme Sandjo, celui de son père, a été ignoré à dessein. Le fils unique de sa mère a été élevé par sa grand-mère. Attachement à la ville de Mbanga, mais davantage à cette maison que lui a léguée son aïeule. Il l’a rénovée, et c’est là que plongent ses racines. C’est sans doute, aussi, ce qu’il transmettra à ses trois enfants.
Lyne Karen Fouda