On lit à l’article 34 du décret n°2005/177 du 27 mai 2005 portant organisation du Ministère de la culture que « placée sous l’autorité d’un Directeur, la Direction de la cinématographie et des productions audio-visuelles est chargé du contrôle des professions et activités cinématographiques et audio-visuelles ».

On verra tour à tour la gestion de l’infrastructure (A) et la gestion du produits audiovisuel, cinématographique et des enregistrement sonores (B).

A – LA GESTION DE L’INFRASTRUCTURE

1) L’autorisation de construire une salle de cinéma

L’autorisation de construction d’une salle de cinéma est accordée aux personnes physiques ou morales requérantes par le Gouverneur de Province territorialement compétent après avis obligatoire de la Commission provinciale d’exploitation des films cinématographiques. En droit administratif, on distingue : l’avis simple, l’avis conforme et l’avis obligatoire.

Dans l’avis simple, l’administration est libre de consulter ou de ne pas consulter l’organe qui est placé à ses côtés, selon qu’elle estime cette consultation utile ou superflue à la solution du problème qui se pose. D’autre part, alors même que l’organisme consultatif a émis un avis, l’autorité de décision n’est pas tenue de se conformer à cet avis. Dans l’avis conforme, l’administration ne peut agir que dans le sens de l’avis qui lui a été transmis. Elle concerne simplement la faculté de ne pas agir du tout, de différer ou d’abandonner la décision.

L’avis obligatoire, signifie que l’autorité de décision (ici le Gouverneur) est obligée de soumettre ce dossier à l’avis de la commission. Mais si l’avis de l’organe consultatif doit être impérativement demandé, l’organe de décision reste libre de se conformer à l’avis qui lui est donné par la commission ou de passer outre.

L’autorisation provinciale d’exploitation est composée de :

– le Délégué Provincial de la Culture, Président ;
– le Délégué Provincial de la Santé Publique, Membre ;
– le Délégué provincial de la Construction, Membre ;
– le Délégué Provincial du MINDUH, Membre ;
– le Délégué Provincial du MINDAF, Membre
– un Représentant de l’Ordre National des Architectes, membres,
– un Représentant de l’Organisation Professionnelle des exploitants des salles de cinéma, Membre.

Le dossier est déposé en six (06) exemplaires à la Délégation Provinciale de la Culture, contre récépissé. Le Délégué Provincial de la Culture transmet un exemplaire du dossier à chaque membre de la commission provinciale d’exploitation dans les dix (10) jours suivant la date de dépôt du dossier. La commission provinciale d’exploitation doit obligatoirement se prononcer dans les quarante cinq (45) jours suivant la date de dépôt du dossier. Dans tous les cas, l’accord ou le refus motivé de l’administration doit intervenir dans les quatre-vingt-dix (90) jours suivant la date de dépôt de dossier. Passé trois (03) mois, l’autorisation de construction est réputée accordée.

L’autorisation de construire est valable pour une durée de deux (02) ans à compter de sa signature.

2) L’autorisation d’exploitation

L’exploitation cinématographique est l’acte par lequel une personne physique ou morale projette ou fait projeter une œuvre cinématographique dans un lieu public ou ouvert au public ou met cette œuvre à la disposition du public.

L’exploitation cinématographique revêt trois (03) formes :

a) L’exploitation en poste fixe
Le décret n°89/493 du 20 mars 1989 prévoit en son article premier qu’aucune représentation cinématographique publique, payante ou gratuite ne peut être donnée dans une salle ne répondant pas aux règles générales d’hygiène, de sécurité et de police.

On entend par exploitation cinématographique en poste fixe celle qui est organisée de façon permanente dans les locaux répondant à ces règles générales d’hygiènes, de sécurité et de police quel que soit le format des films.

L’exploitation d’une salle de cinéma qui ne peut pas être effective avant la fin des travaux de construction, est accordée par le Ministre de la Culture après avis obligatoire de al Commission Locale de Sécurité, d’Hygiène et de police dans les salles de spectacles cinématographiques. Cette commission est composée de :

* Président : l’autorité administrative locale ;
* Membres : – un représentant du Maire
– le Chef de service départemental de la Construction,
– le Chef de district de santé,
– le représentant local des sapeurs-pompiers,
– le commandant de brigade,
– le commissaire
Cette commission qui est instituée par arrêté préfectoral dans chaque commune où le besoin se fait sentir, tient compte des règles de sécurité ci-après pour émettre son avis :
– les règles d’hygiène
Les locaux destinés aux spectacles cinématographiques doivent être dotés d’installations sanitaires et d’eau courante. Ils ne peuvent être installés dans le voisinage des établissements insalubres ou en mitoyenneté des établissements dangereux.

– les règles de sécurité
L’implantation et la construction des salles de spectacles cinématographiques, la disposition des sorties, des escaliers et des sièges, le système d’éclairage et les installations électriques et techniques doivent être effectués dans les conditions propres à prévenir les incendies, à faciliter la lutte contre eux et faciliter l’évacuation des fumées.

– les mesures de police
La construction d’une salle de spectacles cinématographiques ne doit pas être autorisée à une distance de mois de deux cent cinquante mètres d’un établissement scolaire, hospitalier, ou d’un lieu de culte.

L’avis de la commission locale de sécurité, d’hygiène et de police, assorti d’une copie conforme de l’original de la police d’assurance de la salle de cinéma doit être communiqué au Ministre de la Culture dans les 45 jours suivant la notification du Délégué Provincial de l’achèvement de la construction par le promoteur. Le Ministre de la Culture dispose d’un délai de 20 jours pour se prononcer.

Dans tous les cas, l’accord ou le refus notifié du Ministre doit intervenir dans les 90 jours suivant la date de dépôt du dossier. Passé ce délai, l’autorisation est réputée accordée.

Fonctionnement de la commission de sécurité
La commission locale d’hygiène, de sécurité et de police se réunit au moins deux fois par an pour contrôler toutes les salles de spectacles cinématographiques. Elle peut procéder à un contrôle inopiné d’une salle de cinéma, chaque visite donne lieu à la rédaction d’un procès-verbal qui mentionne la conformité des salles contrôlées aux règles ci-dessus ou les infractions à celles-ci.

En cas d’infraction, la commission met l’exploitant en demeure d’y remédier dans un délai qui ne peut excéder deux (02) mois.

Si la mise en demeure est restée sans suite à l’expiration de ce délai, le Président transmet le procès-verbal au Préfet ayant institué la Commission en mentionnant la défaillance.

b) L’exploitation ambulante
L’exploitation ambulante est celle organisée occasionnellement dans un local non initialement conçu à cet effet et dont les projections cinématographiques sont réalisées à l’aide des appareils portatifs au plus soixante (60) jours par an, et moins de trois (03) jours consécutifs.

L’autorisation d’exploitation ambulante des spectacles cinématographiques valables pour la seule province concernée est accordée par le Délégué Provincial de la Culture sur présentation d’un dossier. Le dossier est déposé à la Délégation Provinciale de la culture contre récépissé. Le Délégué Provincial de la Culture dispose d’un délai de trente (30) jours pour se prononcer. Passé ce délai, l’autorisation d’exploitation est réputée accordée.

c) L’exploitation des vidéogrammes
L’exploitation des vidéogrammes est la vente ou la location des cassettes vidéo.
L’autorisation d’exploitation à des fins commerciales ou en public, d’un vidéogramme est accordée par le Délégué Provincial de la Culture sur présentation d’un dossier. Elle est valable pour les exploitations en poste fixe ou ambulant. Le Délégué Provincial de la Culture dès réception du dossier dispose d’un délai de trente (30) jours pour se prononcer. Passé ce délai, l’autorisation d’exploitation est réputée accordée.

En dehors des vidéogrammes, le législateur camerounais ne connaît pas le terme vidéoclub. Les vidéoclubs ne sont pas organisés par la loi. Seule la loi n°95/010 du 1er juillet 1995 portant loi des Finances de la République du Cameroun pour l’exercice 1995/1996 modifiant l’article 50 du Code Général des Impôts institue l’impôt libératoire assis sur le secteur informel, notamment les exploitants de vidéoclubs qui relèvent de la catégorie B et doivent payer trimestriellement entre 21.000 et 40.000 Frs CFA. Cette loi est une loi des finances qui n’a pour seule préoccupation que la multiplication des recettes publiques sans aucune considération de police et d’ordre. Le législateur n’a pas tenu compte de la licéité ou la non licéité de l’activité, un peu comme s’il suffisait d’arrêter un bandit qui paie sur le produit du vol un impôt libératoire et le libérer. Les vidéoclubs prolifèrent dans la plupart de nos centres urbains. De gros intérêts financiers sont en jeu. Une association d’exploitants de cette activité a même vu le jour à Douala.

Selon une récente enquête de l’UNESCO, le public de ces vidéoclubs est composé en majorité d’enfants et des jeunes qui raffolent de films comiques de films d’action (guerre, policier, espionnage, arts martiaux) et de films pornographiques ou programmes X interdits dans les salles de cinéma. Ces vidéoclubs indiquent aux jeunes les techniques et les méthodes d’action et leur « suggèrent » des idées maléfiques de vol, de bagarre et d’assassinat, en somme de mauvais comportements.

Les vidéoclubs constituent au Cameroun un facteur néfaste, car ils perturbent de manière inquiétante la vie sociale, en détournant les enfants de l’école, en faisant la promotion de la violence, de la drogue et de la prostitution.

C’est pourquoi le 16 juin 1999, les « jeunes parlementaires » ( les enfants choisis par leurs pairs qui se sont exprimés au palais de verre de Ngoa-Ekellé) avaient demandé au Gouvernement d’insister sur l’interdiction et la destruction des vidéoclubs dans le pays. Dans le même sens, le Ministre d’Etat chargé de la Culture avait attiré dans une lettre du 07 juillet 1999, l’attention des gouverneurs de provinces sur l’interdiction de l’exploitation des vidéoclubs sur l’ensemble du territoire national. Il leur avait demandé en conséquence de les fermer sans autre forme de procès et dans les plus brefs délais.

De plus, l’arsenal juridique camerounais comporte des textes assurant la protection des jeunes contre la violence à l’écran. Une loi du 16 décembre 1988, fixant l’orientation de l’activité cinématographique indique que la production, la distribution ou l’exploitation des films cinématographiques par des personnes physiques ou morales, sont soumises à une autorisation préalable, délivrée dans des conditions fixées par voie réglementaire. D’autre part, un décret du 09 novembre 1990 crée une commission nationale de contrôle des films cinématographiques et enregistrements sonores. Au regard des intérêts nationaux en jeu, de l’intérêt de la morale, de conservation des mœurs et traditions, de l’influence possible sur la jeunesse, la commission émet son avis soit immédiatement au vu du scénario, des affiches et des programmes, soit après la projection du film devant elle. Malheureusement, il se trouve que la télévision par satellite, et les vidéoclubs sont absolument hors du contrôler de la commission.

Toutefois, même si les 2/3 des films projetés échappent au contrôle des instances nationales, celles-ci peuvent exercer leur influence sur les salles de cinéma et sur le réseau de la CRTV. Mais la censure n’est pas le moyen le plus approprié pour protéger les jeunes contre les vidéoclubs. « Toute interdiction est faite pour être transgressée et détournée », lit-on sur le rapport sur l’enquête mondiale sur les « enfants et la violence dans les médias ». Il faut donc éduquer les jeunes. Ce travail d’éveil et d’éducation du sens critique des enfants semble être du ressort de la famille et des médias.

Dans tous les cas, il faut chercher des voies et des moyens de concilier liberté d’expression et respect des valeurs de la société, notamment dans le secteur des vidéoclubs. L’avenir de notre jeunesse et du pays en dépend.

C’est certainement pour cela et pour arrêter la prolifération des vidéoclubs sans base légale au Cameroun que le Ministre de la Culture a, par décision n°58/CAB/MINCULT/DPAV du 18 octobre 1995 interdit l’exploitation cinématographique en vidéoclubs sur toute l’étendue du territoire et a institué aux chefs-lieux de chaque province, une commission de contrôle mixte chargée de la mise en œuvre de cette interdiction et composée de :
– Président : le représentant du Gouverneur de Province ;
– Vice-président : le Délégué provincial de la Culture ;
– Membres : le Délégué provincial des Affaires Sociales, le Délégué provincial de la condition féminine, le Commandant de légion de gendarmerie, le Délégué provincial de la Sûreté nationale, le représentant de la Direction Générale des Recherches et des Etudes
Chaque descente de la commission sur le terrain donne lieu à la rédaction du procès-verbal avec possibilité des sanctions contenues aux articles 29 et 30 de la loi n° 88/017 du 16 décembre 1988.

Les membres de la Commission locale de sécurité, d’hygiène et de police, ceux de la Commission Nationale de Contrôle des Films Cinématographiques et des Enregistrements sonores, ainsi que les agents de contrôle assermentés, ne sont pas considérés , en raison de leurs fonctions, comme spectateurs et sont tenus de s’acquitter de leurs droits d’accès aux projections commerciales de films cinématographiques ( article 12 du décret n°74/790 du 19 septembre 1974 portant organisation du contrôle des recettes cinématographiques).
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